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Du mauvais œil au Moyen Âge, qui peut nous détruire d'un seul regard, au chat noir de Napoléon, c'est une histoire entre raison, science, et religion. Puis direction Naples, avec ses croyances et ses cultes, quand saint Janvier et Maradona portent bonheur.
Une émission radiophonique en 4 épisodes à écouter ICI
Veillées mensuelles de 30 minutes environ qui ont lieu les 1e mercredis du mois à 19h30 et à tour de rôle dans les consistoires de l’inspection de Bouxwiller.
Et si, une fois par mois, nous faisions une halte pour prier ensemble pour la paix ?
À partir de la rentrée de septembre 2025, l'inspection de Bouxwiller propose une série de veillées de prière pour la paix, préparées à tour de rôle par les consistoires du territoire.
Un projet d’Eglise porté collectivement, pour faire grandir l’espérance dans un monde secoué par tant de conflits, d'injustices, et de peurs.
Chaque premier mercredi du mois à 19h30, pendant environ 30 minutes, une communauté locale accueillera celles et ceux qui souhaitent se rassembler dans la prière, le silence, la musique et la méditation. Ces veillées seront simples, profondes, accessibles à toutes et tous, croyants engagés ou curieux en recherche, habitués des bancs d'église ou passants de passage.
L'enjeu ? Créer un fil rouge spirituel tout au long de l'année, tissé de prières, de paroles bibliques, de gestes de fraternité et d'hospitalité.
Le programme des veillées 2025-2026 :
Mercredi 5 novembre - Eglise de Hohfrankenheim
Mercredi 3 décembre - Eglise d'Issenhausen
Mercredi 7 janvier - Eglise de Dossenheim
Mercredi 4 février - Eglise de Mulhausen
Mercredi 4 mars - Eglise d'Alteckendorf (église d'Ettendorf)
Mercredi 1er avril - Pas de veillée (Semaine Sainte)
Mercredi 6 mai - Eglise de Sindelsberg
Mercredi 3 juin - Eglise de Geiswiller
Chacune de ces veillées est une porte ouverte à la paix, une pause précieuse dans le tumulte des jours, un espace de communion simple et vrai. Que vous puissiez venir une fois, plusieurs fois, ou chaque mois, vous êtes les bienvenus.
Venez comme vous êtes. Venez avec vos questions, vos colères, vos espérances.
Venez prier pour la paix.
Ce projet favorise l'envoi d'« accompagnateurs/trices œcuméniques » bénévoles en vue d'exprimer la solidarité avec les victimes des violations des droits de la personne et du droit humanitaire, de les protéger, de divulguer ces violations et d'intervenir pour qu'elles cessent.
Le Programme œcuménique d’accompagnement en Palestine et en Israël (EAPPI) a été lancé par le Conseil œcuménique des Églises (COE) en 2002 en réponse à une lettre de responsables d’Églises locales appelant à créer une présence internationale dans ce pays.
Le programme assure la présence continue de 25 à 30 accompagnateurs et accompagnatrices œcuméniques (AO) qui œuvrent sur place pendant trois mois, accompagnant les populations et les communautés locales, assurant une présence protectrice et témoignant de leurs luttes et espérances quotidiennes. L’EAPPI est guidé par une « impartialité de principe » : il ne prend pas parti dans le conflit et ne fait aucune discrimination envers qui que ce soit, mais il n’est pas neutre quant aux droits de la personne et au respect du droit international humanitaire.
Originaires de 21 pays du monde entier, les AO sont soutenus par une équipe située à Jérusalem. Un Groupe de référence local représentant les communautés et Églises qui ont demandé à bénéficier du programme contribue à l’orientation de ce dernier, avec l’équipe du COE à Genève et les coordinatrices et coordinateurs nationaux dans les pays d’envoi.
Plus que 2000 AO ont participé au programme, et beaucoup continuent de s’impliquer et de s’intéresser aux actions pour une paix juste en Palestine et en Israël.
www.eappi.org
Jean-Paul Sorg, traducteur et spécialiste de l’œuvre d'Albert Schweitzer est mort le 10 octobre 2025 à l'âge de 83 ans. Le pasteur Roland Kauffmann lui rend hommage.
Tout lecteur d’Albert Schweitzer a rencontré un jour l’œuvre de Jean-Paul Sorg. Que ce soit par ses propres traductions, commentaires ou préfaces ou encore par l’édition de parties essentielles de la bibliographie schweitzerienne. C’est par la publication d’Humanisme et mystique (Albin Michel, 1995), un choix de textes commentés d’Albert Schweitzer, que Jean-Paul Sorg a donné accès à un large public francophone à la pensée du Prix Nobel de la paix 1952. Entre 2005 et 2011, l’édition de la correspondance entre Albert Schweitzer et sa future épouse Hélène Bresslau (trois tomes parus aux éditions Do Bentzinger, Colmar) a ouvert de toutes nouvelles perspectives sur les motivations théologiques et humanitaires du départ à Lambaréné en 1913 puis à la conception d’une véritable philosophie de la civilisation au courant des années 1920.
Troisième contribution essentielle de Jean-Paul Sorg à la connaissance de l’œuvre schweitzerienne : la traduction et l’édition d’un grand nombre de sermons. Mais c’est aussi en tant que rédacteur des Cahiers Albert Schweitzer et initiateur des Études schweitzeriennes que Jean-Paul Sorg a montré l’étendue et la richesse de la notion de Respect de la vie comme transposition philosophique et universelle du commandement d’amour de Dieu et du prochain qui caractérise la pensée du théologien alsacien.
Premières découvertes d’Albert Schweitzer
Jean-Paul Gross est né à Mulhouse en 1941 et rencontre Albert Schweitzer en 1951 lors d’un culte-conférence en plein air où il l’entend « parler sous la pluie de la dignité de l’homme des colonies. » Une préoccupation de la dignité qui marquera l’enfant de 10 ans qu’il était alors et le conduira à creuser inlassablement ces questions sous un angle à la fois politique et philosophique. Lauréat du concours général de philosophie, il sera fortement influencé par Fernand Turlot et surtout Georges Gusdorf et Henri Lefebvre ou encore André Canivez qui lui a fait découvrir l’originalité philosophique de la pensée de Schweitzer.
Jean-Paul Gross a choisi de faire son service militaire dans la coopération comme enseignant et c’est à Saint-Louis du Sénégal qu’il prend le nom de plume de « Jean-Paul Sorg » afin de pouvoir écrire des chroniques sur le cinéma à l’insu de ses élèves. Un nom d’usage qu’il conservera à son retour en France où c’est sous le patronyme de « Sorg » que les lycéens de Guebwiller (68), Fribourg-en-Brisgau (Allemagne), élèves de l’École normale de Guebwiller et étudiants de l’Université de Haute-Alsace à Mulhouse (68) connaîtront leur professeur. Mais aussi les nombreux lecteurs de ses ouvrages consacrés soit à l’œuvre et la pensée de Albert Schweitzer soit aux poètes et essayistes alsaciens, Nathan Katz, Émile Storck ou encore Jean-Paul de Dadelsen.
Fondateur, rédacteur en chef et président
Jean-Paul Sorg a fondé la revue Études schweitzeriennes en 1990 et sous sa direction, la revue publie 12 numéros, qui contiennent des traductions d’inédits, les actes des colloques et des recensions. Rédacteur en chef des Cahiers Albert Schweitzer de 2003 à 2016, il assure également, de 2008 à 2011, la présidence de l’Association française des Amis d’Albert Schweitzer (AFAAS). En 2015, à l’occasion du 50e anniversaire de la mort de Schweitzer et du centenaire de l’énoncé du principe du respect de la vie, il assure le commissariat et la codirection du catalogue de l’importante exposition consacrée à Schweitzer, Entre les lignes, à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg. Auteur d’une quinzaine d’ouvrages dont le plus récent, la traduction nouvelle de Propos sur le Nouveau testament paru en 2025 à l’occasion du cent-cinquantième anniversaire de Schweitzer, Jean-Paul Sorg a également consacré de nombreux articles au « citoyen du monde et homme de Gunsbach » comme aimait à se qualifier Albert Schweitzer.
Son territoire de prédilection
Une double culture, à la fois ouverte à l’universel et enracinée, au sens de la philosophe Simone Weil, dans un territoire fait à la fois d’une histoire particulière et d’une géographie culturelle qu’administrative. En effet, c’est à la mesure de l’espace du Rhin supérieur, dans cette région entre Vosges françaises et Forêt-Noire allemande, de Karlsruhe à Bâle voire Berne, qu’était le territoire de prédilection de Jean-Paul Sorg. Un « pays » qui ne se limite pas à son sol et déborde des frontières parce qu’il se trouve avant tout dans un franchissement des cultures et des langues. C’est en effet dans le langage que se situait la patrie de Jean-Paul Sorg, entre l’allemand et le français, entre l’alsacien et l’alémanique, entre la poésie et la philosophie.
Homme de mots, de lettres et de langues, Jean-Paul Sorg était aussi engagé dans ses convictions. Passé d’une philosophie marxiste à l’origine à une philosophie de l’écologie politique, c’est dans le combat contre la centrale nucléaire de Fessenheim et plus largement pour la sauvegarde de la plaine du Rhin qu’il s’engage. Il était ainsi passé « d’une eschatologie marxiste-communiste à une eschatologie de l’écologie [avant de rencontrer] l’eschatologie conséquente d’Albert Schweitzer ». C’est dans cet esprit qu’il publie un montage de textes poétiques et polémiques, Le Rhin est mort, avec Jean-Paul Klée (éditions bf, Strasbourg, 1976) et en 1984, chez le même éditeur, un essai, Jardingue ou Le droit au jardin, en réponse au Droit à la ville, d’Henri Lefebvre, 1967.
Lauréat de plusieurs prix
Jean-Paul Sorg a été lauréat en 2000 du Prix « Ville de Schongau » attribué par l’Académie d’Alsace pour ses travaux sur Goethe et Schweitzer. C’est aussi en 2000 qu’il a fondé le Cercle Émile Storck, un des grands poètes et dramaturges alsaciens dialectaux. Honoré du Prix Nathan Katz en 2014 pour son anthologie de poèmes d’Émile Storck, Par les fossés et les haies, il avait également reçu en 2022 le prix Charles Goldstein décerné par l’association Heimetsproch un Tràdition. Une défense de la culture et de la langue alsaciennes qui aura mobilisé toute son énergie jusqu’à son dernier souffle.
À l’adage de la philosophie grecque « deviens ce que tu es », Jean-Paul Sorg répondait « Le christianisme (…) a ajouté l’idée que ce n’est pas dans le souci de soi que l’homme s’accomplit mais dans le souci ou le soin de l’âme, dans le service, le dévouement et la grâce. Deviens toi-même dans un mouvement de vie pour autrui et pour le monde. »
Roland Kauffmann, pasteur
PS L’Union des Églises protestantes d’Alsace et de Lorraine rend hommage à l’un de ses plus célèbres pasteurs à l’occasion du 150e anniversaire de sa naissance, le 14 janvier 1875, en proposant en 2025, une série de manifestations labellisées « Année Schweitzer ».
Mardi 28 octobre, Rencontres amicales a accueilli avec joie Christian Albecker, ancien président de l’UEPAL, qui a rendu compte de sa visite en Israël-Palestine en juillet 2024 à l’occasion d’une réunion organisée par la CIMADE et les Amis de Sabeel France. Voir les photos ICI
Pour rappel, notre Paroisse soutient un projet de solidarité entre chrétiens dans le cadre du Service Mission de l’UEPAL pour l'année 2025 :
Palestine : Accueillir les élèves malgré tout !
Depuis le 7 octobre 2023, la guerre à Gaza a également des répercussions dramatiques en Cisjordanie où se déroulent de nombreuses exactions armées.
La limitation de la liberté de déplacement, la confiscation de terres, la destruction d’infrastructures et la chute du tourisme ont engendré une grave crise économique. Par la force des choses, de nombreuses familles palestiniennes ont perdu la possibilité de travailler et connaissent des difficultés sociales importantes.
Église évangélique luthérienne de Jordanie et de Terre sainte (ELCJHL – dont le site internet est ICI) accueille en Cisjordanie 1.250 élèves dans ses 3 écoles principales, qui sont à la fois des lieux d’enseignement et de promotion de la paix.
De nombreuses familles n’ont plus les moyens d’assumer les frais de scolarité.
L’Église luthérienne continue d’accueillir leurs enfants, comptant sur notre soutien pour être en capacité de poursuivre sa mission éducative.
Projet en partenariat avec l' Action chrétienne en Orient (ACO – dont le site internet est ICI).
Certains États tendent à reconnaître une religion "officielle". Confondre État et religion cause pourtant de nombreux problèmes.
Un État peut-il incarner une religion ? Aujourd’hui Israël se présente comme l’« État juif », l’Inde comme celui de l’hindouisme, l’Afghanistan ou l’Iran se veulent des États islamistes, Trump ne cesse de se référer à la religion chrétienne et son mouvement MAGA est soutenu par la plupart des Églises évangéliques. En France, nous défendons une autre conception : le respect de toutes les religions, se traduisant par un État responsable de la liberté des cultes, appliquant le principe de laïcité.
Un État lié à une religion est nécessairement autocratique puisqu’il considère ses concitoyens ne pratiquant pas la religion officielle comme des hérétiques. Par conséquent, ces derniers ne sont pas de véritables citoyens et subissent au mieux des restrictions de liberté, au pire des persécutions. Les protestants savent par leur histoire ce que cela signifie.
Un État religieux rend la critique difficile. On est tout de suite qualifié d’antisémite si on s’attaque à Israël, d’islamophobe si on condamne un État prônant un islam rigoriste… En fait, c’est en s’assimilant à une religion que ces États placent celle-ci dans une situation particulière. Condamner les horribles et inacceptables attentats du 7 octobre 2023 ou l’attitude des talibans, ce n’est pas assimiler l’islam à ces actes barbares. De même, il est inacceptable d’être considéré comme antisémite quand on condamne la guerre menée par Israël à Gaza et qu’on la considère excessive. Vouloir anéantir le Hamas est sain ; mener une guerre aussi meurtrière pour la population civile pose pour le moins question.
Croire est un droit absolu, mais pourquoi l’État dont je suis le citoyen prétendrait-il m’imposer une religion ? Pourquoi critiquer un État serait-il une atteinte à une religion ?
Christian Philip, recteur et professeur des Universités, ancien député. Pour www.reforme.net
Dire que la laïcité est une religion, c’est confondre la neutralité avec une croyance.
La laïcité, c’est un cadre juridique et politique, pas une foi.
Elle garantit la liberté de conscience, pas son absence. La laïcité protège la liberté de croire et de ne pas croire, elle s’adresse à l’État et à ses représentants, pas aux citoyens dans leur vie privée.
Pasteur Élisabeth Muths
À Gaza, Dieu est sous les décombres.
Sermon donné le 22 octobre 2023 à l’église de Noël à Bethléem par le pasteur Munther Isaac. Ce sermon de lamentation et de colère, cri contre la guerre qui se poursuit à Gaza, a été prêché en Palestine le 22 octobre 2023, à l'église évangélique luthérienne de Beit-Sahour et à l'église évangélique luthérienne de Noël de Bethléem. Trois jours plus tôt, le 19 octobre 2023, les forces de défense israéliennes avaient attaqué l'église orthodoxe grecque Saint-Porphyre, la plus ancienne église en activité de Gaza, construite en 1150. L’église a été endommagée par ce bombardement et 18 personnes ont été tuées, d'autres ont été blessées, et environ 400 civils qui s'étaient réfugiés dans le complexe de l'église ont dû être déplacés. Les Amis de Sabeel France ont traduit cette prédication à partir de sa version anglaise.
Ils ont assiégé notre famille palestinienne à Gaza, ils ont traité ses membres de monstres, et les ont blâmés, accusés. Leurs maisons ont été bombardées, leurs quartiers d’habitation rasés, les habitants ont tous dû partir, et ce sont eux qui ont été accusés. Nos familles, nos frères et nos sœurs, nos tantes et nos oncles, nos neveux et nos nièces avaient cherché refuge dans des écoles et ils y ont été bombardés, dans des hôpitaux et ils y ont été bombardés, dans des lieux de culte et ils y ont été bombardés, et ce sont eux qui ont été accusés.
Nous sommes tous brisés. Les habitants de Gaza souffrent. Ils ont tout perdu, tout, sauf leur dignité. Beaucoup d’entre eux sont entrés dans la gloire : la gloire du martyre, mais sans l’avoir cherché. Et aujourd'hui, une fois de plus dans notre histoire, ils se retrouvent devant le même choix : la mort ou partir. Notre Nakba continue ! (le terme arabe « Nakba » signifie « catastrophe » ou « désastre »)
Où voulez-vous qu’ils aillent ? Il n'y a pas de place pour eux dans ce monde !
Les grandes nations de ce monde sont contre eux. Elles ont recours aux finances, aux armes, à la diplomatie et à la théologie contre le peuple de Palestine, contre le peuple de Gaza. Ils discutent entre eux de l'endroit où nous finirons après le nettoyage ethnique qu’ils nous imposent, comme si nous étions des boîtes en trop pour lesquelles il n’y a pas de place dans la maison !
Il n'y a plus aucune pitié. Plus aucune humanité. Plus personne pour pleurer notre mort. Personne n’est là pour arrêter cette machine de guerre, parce que nous ne sommes pas des membres du bon peuple, de la bonne religion, de la bonne race. Nous ne faisons pas partie des « élus ». Les puissances politiques du monde nous considèrent comme un obstacle, et non comme un allié. Nous avons été brisés, et nous le sommes à nouveau chaque jour : par toutes les images de mort, surtout lorsque ce sont nos proches qui sont touchés par elle : nos familles, nos sœurs, nos parents, tous ces êtres chers avec lesquels nous nous entretenions chaque jour. Nous sommes brisés, tous. Nous entendons des histoires terrifiantes qui nous parlent de l'enfer sur la terre. L'enfer est une réalité à Gaza aujourd'hui. Et nos frères et sœurs palestiniens le vivent en ce moment même.
Ce qui se passe à Gaza n'est pas une guerre ou un conflit, c’est un anéantissement, un génocide permanent, un nettoyage ethnique par la mort et les déplacements forcés. Les puissances politiques de ce monde sacrifient le peuple de Palestine pour garantir leurs intérêts au Moyen- Orient. Elles affirment que notre anéantissement est nécessaire pour assurer la sécurité du peuple d'Israël. Elles nous offrent en sacrifice sur l'autel de l'expiation, et c’est nous qui payons, de notre vie, le prix de leurs péchés.
Où est la justice ? Ils parlent du droit international. Ils nous font la leçon sur les droits de l'homme et nous regardent de haut, comme s'ils étaient supérieurs à tous les autres en matière de valeurs et de morale. Je leur dis : « Allez-vous-en avec vos lois et vos discours sur les droits de l'homme ». Vous, les Européens et les Américains, vous avez été mis à nu aujourd'hui devant le monde entier. Tous ont vu votre racisme, et votre hypocrisie. Vraiment, vous n’avez pas honte ? Moi, personnellement, je ne veux pas vous entendre parler de paix et de réconciliation.
Ce que veulent les habitants de Gaza aujourd'hui, c’est Vivre. Ce qu’ils veulent, c’est une nuit sans bombardements. Ce qu’ils veulent, ce sont des médicaments, et des opérations chirurgicales avec une anesthésie. Ils veulent que soient satisfaits leurs besoins les plus élémentaires pour pouvoir vivre : de la nourriture, de l'eau propre, et de l'électricité. Ils veulent la liberté, et une vie dans la dignité. Ceux qui sont constamment bombardés, battus et persécutés ne veulent pas qu’on leur parle de réconciliation et de paix. Ils veulent simplement que l'agression prenne fin !
Ils nous ont demandé de prier. Les gens de Gaza continuent à nous demander de prier, et eux- mêmes ne cessent de prier. Où trouver une telle foi ?
Nous aussi, nous avons prié. Nous avons prié pour leur protection... et Dieu ne nous a pas répondu. Même dans la « maison de Dieu », dans les bâtiments de l'église, ils n'ont pas été protégés. Nos enfants meurent face au silence du monde, et face au silence de Dieu. Qu’il est dur à vivre, le silence de Dieu ! Aujourd'hui, nous crions avec les psalmistes : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi as-tu abandonné Gaza ? Jusqu'à quand l'oublieras-tu tout à fait ? Pourquoi lui caches-tu ta face ? Le jour, je t'appelle, et tu ne réponds pas ; la nuit, et nous ne trouvons pas le repos. Ne t'éloigne pas des gens de Gaza, car le danger est proche, et il n'y a pas d’aide. Seigneur, notre Dieu sauveur ! Le jour, la nuit, nous avons crié vers toi ... Que notre prière parvienne jusqu’à toi ... Tends l'oreille à notre plainte ... Car notre vie est saturée de malheurs, et nous frôlons les enfers... Nos yeux sont épuisés par la misère. Nous t'avons appelé tout le jour, Seigneur, les mains ouvertes vers toi. Pourquoi nous rejeter ? Pourquoi nous cacher ton visage ? » (adapté à partir des psaumes 13, 22 et 88).
Nous cherchons Dieu ici, dans ce pays, ici sur cette terre. Et théologiquement, philosophiquement, nous demandons : Où donc est Dieu quand nous souffrons ? Comment expliquer son silence ?
Mais ne nous attardons pas à la philosophie et à des questions existentielles. Dans ce pays, même Dieu est victime de l'oppression, il est victime de la mort, de la machinerie de guerre, et du colonialisme. Nous voyons le Fils de Dieu ici sur cette terre crier la même question quand il est sur la croix : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? Pourquoi permets-tu que je sois torturé ? Que je sois crucifié ?
Dieu souffre avec le peuple de ce pays. Son destin est le même que le nôtre. Comme l'a écrit Mitri Raheb dans son article « Théologie dans le contexte palestinien » qu’on peut lire en arabe dans un livre que j'ai publié : « Quant au Dieu de ce pays, il n'est pas comme les autres dieux... Sa terre est labourée avec du fer... Ses temples sont détruits par le feu... Son peuple est foulé aux pieds, et il ne bouge pas le petit doigt. Le Dieu de cette terre est caché à la vue. Vous cherchez ses traces, mais vous ne les trouvez pas. Vous désirez ardemment qu'il déchire les cieux et qu'il descende pour voir. Pour entendre. Pour être compatissant. Pour nous sauver. Le Dieu de cette terre ne repousse pas les armées et leur brutalité, mais il vient partager le sort de son peuple. Sa maison est détruite. Son fils est crucifié. Mais son mystère ne périt pas. Au contraire, il renaît des cendres, il se relève et c’est avec les réfugiés que vous le voyez. Il marche et, dans l'obscurité de la nuit, il fait jaillir des sources d'espoir. Sans ce Dieu, la Palestine reste une terre brûlée. Sans lui, elle reste un champ de destruction. Mais si Dieu piétine ses fondations, c’est uniquement pour en faire une terre sainte, une terre où la bonne nouvelle de la paix résonne sur les collines. »
Bien-aimés, en ces temps si durs, consolons-nous avec la présence de Dieu au milieu de la douleur, et même au milieu de la mort, car Jésus n'est pas étranger à la douleur, aux arrestations, à la torture, et à la mort. Il est à nos côtés dans notre douleur.
À Gaza, Dieu est là sous les décombres. Il est avec ceux qui ont peur, il est avec les réfugiés. Il est là dans la salle d'opération. C'est cela notre consolation. Il traverse avec nous la vallée de l'ombre et de la mort. Si nous voulons prier, ma prière c’est que ceux qui souffrent ressentent cette présence qui guérit, et qui réconforte.
Nous avons un autre réconfort encore : celui de la résurrection. Quand nous avons le cœur brisé, quand nous souffrons, quand nous affrontons la mort, répétons-nous la bonne nouvelle de la résurrection : « Christ est ressuscité ! ». Il est devenu le premier-né de ceux qui se sont endormis. Quand j'ai vu les images des corps de ces saints dans leurs sacs blancs devant l'église, lors de leurs funérailles, c’est cet appel du Christ qui m’est venu à l’esprit : « Venez, les bénis de mon Père, recevez en partage le Royaume qui a été préparé pour vous depuis la fondation du monde » (Matthieu 25,34).
Devant les images de la mort et toutes les photos d'enfants morts, nous pouvons entendre aujourd'hui l'appel immortel du Christ : « Laissez venir à moi les petits enfants et ne les en empêchez pas, car le royaume de Dieu est à ceux qui sont comme eux » (Marc 10,14). S'il n'y a pas de place pour les enfants de Palestine et les enfants de Gaza dans ce monde cruel et oppressant, ils ont une place dans les bras de Dieu. Le Royaume est pour eux. Face aux bombardements, face aux déplacements, et face à la mort, Jésus les appelle et leur dit : « Venez à moi, vous qui êtes bénis par mon Père. Laissez venir à moi les enfants, car le Royaume est à eux ». C’est cela que nous croyons. Et c'est cela notre consolation dans notre douleur. Amen.
Munther Isaac
Munther Isaac est pasteur de l'église évangélique luthérienne de Noël à Bethléem, doyen du Collège biblique de Bethléem, et directeur des conférences « Christ au checkpoint ». Son dernier livre s'intitule L'autre côté du mur - Un récit chrétien palestinien de lamentation et d'espoir. Il vient d’être traduit en français et doit être publié avant Noël.
Au nom de l'UEPAL, Isabelle Gerber remercie Madame Loiseau pour son intervention au Parlement européen.
Ces derniers jours ont été marqués d’abord par le bruit sec d’une balle, celle qui a tué, le 10 septembre, Charlie Kirk, ce jeune influenceur américain, fervent soutien de Donald Trump. Puis vint la clameur de ses partisans, choqués, à juste titre, par cet assassinat sauvage. Ils n’étaient pas les seuls à être sidérés ; nous l’étions tous de voir une fois encore la scène politique américaine endeuillée par un meurtre odieux.
Sidérée, je l’ai été aussi quand les extrêmes droites européennes, si promptes à se dire patriotes, d’ordinaire si hostiles aux signes d’une mondialisation qu’elles dénoncent, ont aussitôt milité pour que l’on rende hommage à Charlie Kirk. La surenchère est venue très vite : pourquoi ne pas lui remettre le prix Sakharov de la liberté d’opinion ? a proposé Reconquête ! Pourquoi ne pas exiger une minute de silence en plénière du Parlement européen ? a lancé un député suédois, soutenu illico par le Rassemblement national. Pourquoi se gêner et ne pas détourner le slogan « Je suis Charlie » ?, a osé Jordan Bardella.
Sidérée, je l’étais qu’on veuille faire de Charlie Kirk non plus une victime mais un héros, qui plus est un héros européen. Qu’on ose demander à notre Parlement de rendre hommage à un activiste qui avait glorifié la ségrégation raciale, l’esclavage, appelé les femmes à rentrer chez elles, diabolisé l’homosexualité, vomi sur l’Ukraine, reproché aux juifs de favoriser l’immigration, réclamé la peine de mort pour Joe Biden, qu’on exige des députés réunis à Strasbourg, dans l’hémicycle que présida Simone Veil [1927-2017], qu’ils s’inclinent à la mémoire d’un homme qui comparait l’IVG à l’holocauste du XXIe siècle.
Sidérée, je l’étais, mais silencieuse, non. J’ai répondu à cette demande des extrêmes droites, formulée avec insistance et répétée par tous leurs députés, en exposant mes arguments [le 12 septembre]. Je m’attendais à n’être qu’une voix parmi beaucoup d’autres. J’ai été la seule, sur 720 députés européens, à m’exprimer pour demander qu’on fasse la différence entre la condamnation unanime que nous devions faire face à l’assassinat d’un homme et le refus de cautionner ses idées. Aucun autre parlementaire n’a pris la peine d’exposer son point de vue. Certes, la présidente du Parlement n’a pas accordé la minute de silence exigée, sans fournir d’explication. Mais le silence de mes collègues face aux exigences de l’extrême droite a duré beaucoup plus qu’une minute.
Méthodes de voyous
Ce silence, il s’est poursuivi quand j’ai fait l’objet de menaces de mort, sur les réseaux sociaux mais pas seulement, pour avoir osé dire qu’une victime ne faisait pas nécessairement un héros. Il s’en est trouvé, des partisans de Charlie Kirk, les mêmes qui avaient crié à la violence politique et à la mort de la liberté d’expression, pour m’injurier, m’enjoindre de me taire et me menacer du même sort que leur idole. Il s’en est trouvé bien peu, en revanche, parmi les belles âmes, les modérés, les adversaires autoproclamés de l’extrême droite, pour m’apporter leur soutien. Ou plutôt, ils ont été très nombreux, les Français ordinaires, que je ne connaissais pas, qui ont pris la peine de m’écrire, de m’encourager et de me soutenir. D’autres Européens aussi, que je ne connais pas davantage. Merci à eux. Mais les politiques ? A l’exception de quelques-uns, peu nombreux, ce fut le silence.
Ce mutisme inexplicable, on me l’a expliqué, à l’oreille. Ils avaient peur. Peur d’être pris à partie sur les réseaux sociaux, comme moi, d’être menacés, comme je l’ai été. Alors autant ne rien dire, n’est-ce pas ? Et c’est cela qui m’effraie, leur silence. Parce qu’il faut à la fois raison garder et rester fidèle à ce qu’on est. Raison garder, car je n’ai fait preuve d’aucun courage en disant ce que je pense. Nous sommes en démocratie et la liberté ne s’use que si l’on ne s’en sert pas. Les insultes ? Aussi virtuelles que les réseaux sociaux qui les charrient. Les menaces ? Déplaisantes, bien sûr, mais, puisqu’elles sont faites pour intimider, il est impératif de les ignorer. Désormais, mes contempteurs ont choisi de s’en prendre aussi à mon mari. Ce sont des méthodes de voyous et ce sont en effet des voyous. Mais, si on ne leur résiste pas quand ils attaquent, quand leur résistera-t-on ?
A ceux qui se taisent, j’aimerais rappeler ce qu’ils savent déjà : ce n’est pas qu’une minute de silence que réclamaient les nouveaux adeptes de Charlie Kirk, c’est réduire au silence ceux qui ne pensent pas comme eux. Ce n’est pas le respect des morts qu’ils exigent, c’est le droit d’insulter et de haïr les vivants qui ne leur ressemblent pas. Ce n’est pas la violence politique qu’ils dénoncent, c’est l’intimidation qu’ils utilisent. Ce n’est pas la liberté d’expression qu’ils défendent, c’est la banalisation de leurs outrances. En Amérique comme en Europe.
Souvenez-vous : à la fin de La Résistible Ascension d’Arturo Ui, Bertolt Brecht [dramaturge allemand, 1898-1956] nous prend à partie : vous, apprenez à voir, plutôt que de rester les yeux ronds.
Nathalie Loiseau, ancienne ministre des affaires européennes, est députée européenne (Renew Europe) et membre d’Horizons.
La Communion des Églises protestantes en Europe (CEPE) se mobilise sur le thème « Église et démocratie ». C'est sur ce même thème que la Commission des Affaires Sociales, Politiques et Économiques de l'UEPAL proposera dès l'automne 2025 différents événements.
C'est indéniable, la démocratie se trouve grandement fragilisée dans le monde entier. Des régimes totalitaires la remplacent, même là où on la pensait bien ancrée. À côté de l'urgence climatique, s'invite l'urgence démocratique. Il nous faut penser et repenser notre vivre ensemble. L'Église n'a pas toujours défendu la démocratie. Elle a longtemps brillé par le mode autoritaire cherchant à réguler la vie des gens. Aujourd'hui, l'Église s'essaie à la synodalité, cultive l'attention aux précaires et renoue, ce faisant, avec le cœur de l'Évangile. L'affirmation de l'égale dignité de chaque être humain est un outil puissant face aux dictatures. En prônant le service et la solidarité, l'Église est instrument de justice et de paix.
Placer sa confiance en Dieu dans des temps troubles est un acte militant. Les discours de haine portés par les partis extrémistes s'inspirent du discours religieux, faisant de la foi chrétienne un enjeu d'identité contre des populations et croyants d'autres horizons. Quand les repères s'estompent, certains cultivent la nostalgie de l'ordre, sont tentés par l'autoritarisme et la figure charismatique d'un leader, d'une idole.
La paresse intellectuelle adhère aux solutions miracles. Exclure les étrangers suffirait à redresser la morale et l'économie. Ces thèses reposent sur l'ignorance et traduisent l'incapacité, pour beaucoup, de faire face à la complexité du monde.
Dire et parler
Être disciple du Christ signifie, plus que jamais, créer du lien et déconstruire les mécanismes de désignation du bouc émissaire. Les armes rhétoriques du débat politique font déjà des victimes. Dans les esprits s'installe l'idée que les étrangers, les personnes qui sortent de la norme sont à l'origine de tous les dysfonctionnements de la société.
La démocratie n'est pas une fin en soi, ce qui importe c'est de promouvoir des modes de gouvernance qui garantissent un vivre ensemble pacifique. Critiquer ceux qui gouvernent est facile. Acceptons de prendre notre part dans la manière de construire le quotidien, dans notre ville, dans notre pays, dans notre paroisse. S'engager c'est résister à la spirale du fatalisme et de l'inaction.
Il ne s'agit ni de vénérer ni de sacraliser la démocratie. Elle est faillible. Nous la défendons parce qu'elle fait place à l'altérité et a le souci de limiter son propre pouvoir. Les mandats des élus sont limités dans la durée, le débat contradictoire y est bienvenu. L'état de droit organise lui-même les contre-pouvoirs, gage de pluralisme, de justice et de liberté. Les thématiques sécuritaires pullulent et l'on sent bien que l'Europe n'est pas à l'abri d'un conflit armé. Un kit de survie sera envoyé prochainement aux citoyens français pour acquérir les bons réflexes en cas de pandémie, catastrophe naturelle ou conflit majeur. L'argent, en France et dans les pays qui l'entourent, va être injecté massivement dans la défense. Qu'avons-nous à dire ? Si ce n'est qu'investir dans l'école, la jeunesse et le social est un facteur majeur d'apaisement.
Face à l'angoisse, l'insatisfaction et le ressentiment qui nourrissent le vote extrémiste, nous avons, en tant que chrétiens, des atouts considérables à partager : la joie imprenable d'enfants qui se savent aimés de Dieu tels qu'ils sont, l'appel incessant à ne pas céder à la peur et l'espérance d'un Dieu plus fort que toutes les puissances à l'œuvre dans le monde.
Nous ne nous tairons pas parce que nous sommes héritiers d'une Parole qui invite à choisir la Vie.
Les gens qui se laissent séduire par des discours simplistes expriment leur désarroi, leur sentiment de ne pas être écoutés, leur sentiment de dépassement et d'abandon face à la multiplicité des enjeux. Offrons des gestes, des mots, des espaces communautaires pour accompagner nos contemporains dans l'accueil de la complexité du vivant et de la société. Notre défi majeur, dans un monde individualiste exposé aux dimensions planétaires, est de réenchanter le sentiment d'appartenance au même monde, de contribuer à l'élaboration du tissu social. Apprendre à coudre, recoudre, en découdre, patiemment, joyeusement, avec ce qui nous est donné.
Il s'agit, ni plus ni moins, de réapprendre à faire monde commun et de confier notre avenir au Dieu de Jésus Christ qui nous dit : « Que votre cœur ne se trouble pas. Croyez en Dieu, croyez en moi » (Jean 14, verset 1).
Isabelle GERBER
Pasteure, présidente de l’Union des Églises protestantes d'Alsace et de Lorraine (UEPAL).
Lutter contre la morosité
Pour cette rentrée, j’aimerais vous offrir un microscope. À l’heure du retour au travail et un rythme plus soutenu, aiguisons notre regard aux petites réalités.
Les médias et réseaux sociaux excellent dans leur capacité à zoomer en permanence, faisant de n’importe quel fait divers croustillant un événement planétaire, s’encombrant peu des nuances, de la véracité des faits, broyant au passage les gens et les lieux désormais associés au drame qui les a touchés. J’aimerais vous inviter à tout l’inverse : prendre le temps d’écouter, de peser, de nuancer et surtout d’être attentif aux petites choses.
Mon cœur déborde de reconnaissance quand je pense à toutes les initiatives locales qui fleurissent dans nos paroisses et communes. Des bénévoles qui se relaient pour rendre visite aux isolés ou faire visiter l’église. Ici et là, dans le secret de leur chambre, des hommes et des femmes qui prient pour les malades, les abîmés de l’existence, ceux qui nous gouvernent. Des générations mêlées qui prennent soin du vivant en plantant des arbres. Un groupe qui se retrouve, semaine après semaine, pour lire la Bible, un autre qui s’attèle à la rénovation d’un bâtiment pour qu’il soit éco-responsable tout en gardant son cachet. Des pasteurs et des laïcs qui rivalisent d’ingéniosité pour inviter au culte, au catéchisme, au cours de religion à l’école. Je rends hommage à Madame Anne Onyme qui laisse un mot dans la boîte aux lettres d’une personne endeuillée. À Monsieur Untel qui s’est donné la peine de s’attarder après le culte pour remercier le sacristain, l’organiste, le célébrant et les membres de la chorale.
La diaconie, comme son étymologie le suggère (le mot grec dia-konia signifie : à travers la poussière) se vit et se voit dans les petites choses ; les poussières, les invisibles de chaque instant. Le microscope est efficace au loin et au près.
Alors que des puissants sans scrupule se réjouissent du bénéfice qu’ils tireront de la reconstruction de la bande de Gaza qu’ils s’accordent à détruire et affamer, des gens de bonne volonté se démènent pour acheminer des vivres, soigner, et inlassablement, créer et reconstruire des ponts entre Israéliens et Palestiniens, chrétiens et musulmans pour frayer un chemin à la vie, la justice, l’amitié.
À mon retour de congés, je suis ravie de retrouver ces proches acteurs de mon quotidien, faiseurs de communautés qui s’ignorent ; les paroissiens et paroissiennes, les ministres d’Église, tout comme le boulanger, le facteur, le chauffeur de bus et tant d’autres.
Les évangiles soulignent l’acuité visuelle de Jésus. Il voit bien, très bien même. Il voit les foules (Matthieu 5,1), il voit Zachée, juché sur son arbre (Luc 19,5). Il nous voit, nous regarde avec amour et nous invite à traduire notre foi par des engagements concrets (Marc 10,21+23).
Chaque fois que vous êtes tentés de vous rallier au mécontentement général, sortez votre microscope et partagez le beau, le bien qui vous entoure. Le microscope ; un outil indispensable dans la lutte contre la morosité.
Isabelle GERBER Pasteure, présidente de l’Union des Églises protestantes d'Alsace et de Lorraine (UEPAL), présidente de l'Église protestante de la Confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine (EPCAAL).
Chaque fois que je pense à la situation à Gaza, le mot qui me vient à l’esprit est celui de tragédie. Une tragédie est une histoire qui finit mal et dans laquelle il n’y a que des perdants. Un éditorial d'Antoine Nouis, directeur de Réforme.
Les plus grands perdants de la guerre à Gaza sont les Palestiniens qui subissent la double peine de vivre sous un régime totalitaire et de subir une guerre épouvantable avec son lot de destructions et de désastres. Jacques Ellul disait qu’une guerre limitée était un contresens car dans une guerre les combattants finissaient toujours par utiliser toutes les armes qui sont à leur disposition. Les Israéliens ont attaqué Gaza pour éliminer les terroristes et ils en sont venus à bombarder les populations civiles et les hôpitaux, et à provoquer – certains disent orchestrer – une famine. C’est insupportable.
Les autres perdants sont les Juifs d’Israël et d’ailleurs. Les attentats du 7-Octobre ont laminé en Israël les partisans de la paix et du dialogue avec les Palestiniens. La jeunesse israélienne ne sortira pas indemne d’avoir été conduite à participer à une guerre qui commet des horreurs. Et les Juifs du monde entier sont les victimes d’un retour de l’antisémitisme. Pourquoi, dans toutes les manifestations d’Europe – en France pendant la journée du 10 septembre –, brandit-on le drapeau palestinien et jamais les drapeaux ukrainien ou soudanais ? Il n’y a pas qu’à Gaza que se déroule une guerre insupportable. Peut-être est-on plus exigeant avec Israël parce que c’est le peuple qui a apporté au monde l’idée de la séparation des pouvoirs, de la dignité des pauvres et du respect de l’étranger.
Une guerre injuste et cruelle
Qui sont les responsables de cette tragédie ? Le Hamas, qui est à l’origine du conflit. Aujourd’hui encore, il suffirait qu’il relâche les otages encore vivants pour que la situation d’Israël devienne intenable. Mais aussi le gouvernement Nétanyahou, qui est l’otage de l’extrême droite et s’est enfermé dans une idéologie mortifère dont le secret espoir est d’éliminer tous les Palestiniens. Pour cela il n’hésite pas à envoyer sa population faire une guerre injuste et cruelle.
On peut ajouter les pays arabes qui sur le papier défendent leurs frères palestiniens mais qui se gardent bien de les accueillir chez eux. J’ai eu l’occasion de me rendre en Égypte et mes interlocuteurs m’ont bien précisé que leur gouvernement faisait tout pour garder fermée la frontière avec Gaza, car ils ne voulaient pas des Palestiniens chez eux. Comme toute tragédie, la guerre à Gaza finira mal. Il ne faut pas se voiler le visage, il ne reste que nos yeux pour pleurer et nos prières pour supplier.
Le rassemblement annuel des protestants réformés dans les Cévennes, à l’assemblée du Désert : culte en plein air, chaire portative et pique-nique…
Chaque premier dimanche de septembre, les protestants se réunissent au Mas Soubeyran. L’événement, qui s’est tenu le 7 septembre, est un grand moment pour célébrer leur foi et se souvenir de leur histoire de persécution et de résistance.
Longtemps, la route serpente sur les versants des Cévennes méridionales. Un peu après 9 heures, on arrive enfin. La foule, déjà, commence à affluer au Mas Soubeyran (Gard), hameau dont les maisons de granit émergent au milieu d’une épaisse forêt. En famille, entre amis, parfois avec leur paroisse, des centaines de fidèles viennent participer au plus grand événement annuel de leur Eglise : l’assemblée du Désert. Depuis plus d’un siècle, les protestants français, en particulier d’obédience réformée (ou « calviniste »), convergent ici, le premier dimanche de septembre, pour un rassemblement spirituel et mémoriel.
Parmi les participants, en ce 7 septembre, beaucoup arrivent du voisinage cévenol, à la forte culture réformée, ou bien de Nîmes et de Montpellier, deux villes relativement proches où le protestantisme est bien implanté. D’autres ont fait un chemin bien plus long. C’est le cas de James Woody, pasteur parisien qui a emmené une trentaine de paroissiens. S’il a organisé cette excursion, c’est parce que le Mas Soubeyran est un « lieu mythique pour les protestants ». « Venir ici, explique-t-il, c’est l’occasion de se souvenir de notre passé. »
Caroline, accompagnée de sa mère et de ses deux fils, de 8 ans et 11 ans, lui emboîte le pas : « Mon oncle m’avait emmenée à l’assemblée du Désert quand j’avais une vingtaine d’années et, comme protestante, cela m’avait beaucoup marquée, glisse-t-elle avec un sourire. C’est pour ça que j’ai voulu y emmener mes enfants. C’est une manière de leur transmettre l’histoire de nos ancêtres. »
Religion en secret
Les ancêtres, le passé, l’histoire : parmi les personnes présentes, beaucoup emploient ces mots pour expliquer leur venue. « La mémoire protestante est une dimension essentielle de l’assemblée du Désert », explique l’historien Patrick Cabanel, qui vient chaque année au Mas Soubeyran.
Deux références historiques sont largement mobilisées. La première, c’est le « Désert ». « Les réformés appellent ainsi la période durant laquelle ils furent persécutés », indique ce spécialiste du protestantisme. A partir de 1685, année où Louis XIV révoque l’édit de Nantes, jusqu’à l’édit « de tolérance » de 1787, la « religion prétendue réformée » n’a plus droit de cité dans le royaume de France.
« Tout au long de ces années, les huguenots, c’est-à-dire les réformés français, se réunissaient dans des lieux isolés pour pratiquer leur religion en secret. Lecteurs de l’Ancien Testament, ils se sont identifiés aux Hébreux qui, une fois sortis d’Egypte, errent dans le désert avant d’atteindre la Terre promise. De cette analogie vient le “Désert” protestant », explique l’auteur de La Fabrique des huguenots. Une minorité entre histoire et mémoire (Labor et Fides, 2022). Il précise encore : « A l’assemblée, le culte est organisé en plein air, pour commémorer les cérémonies clandestines. Et le pasteur monte dans une chaire portative et démontable, comme celles qu’on installait au fond d’une grotte ou d’une forêt. »
Le lieu où est organisée l’assemblée fait aussi écho à une autre page de l’histoire huguenote : la révolte des camisards, au début du XVIIIe siècle. Depuis sa première édition, en 1911, le rassemblement se tient en effet devant le Musée du Désert, un musée-mémorial protestant installé dans la maison de Pierre Laporte (1680-1704), dit « Rolland ». L’homme fut l’un des grands chefs du soulèvement qui, de 1702 à 1704, embrasa les Cévennes au nom de la foi réformée. Quand l’armée royale acheva d’écraser les insurgés camisards, Rolland refusa de se rendre et fut tué les armes à la main, laissant le souvenir romantique d’un rebelle mort en combattant. La mémoire huguenote imprègne donc l’air du Mas Soubeyran. Deux mots la résument : persécution et résistance.
Conservateur du Musée du Désert et organisateur de l’assemblée, Denis Carbonnier insiste lui aussi sur ce rapport au passé : « Nous, protestants, avons toujours été une petite minorité dans la société française. Et, comme toutes les minorités, nous avons besoin de lieux de mémoire où notre identité s’incarne. Le musée et l’assemblée du Désert en sont. »
Chaises pliables et rosé
De plus en plus nombreux à mesure que la matinée avance, les fidèles s’installent sur les pentes enherbées qui forment comme un théâtre naturel à l’ombre des chênes et des châtaigniers. Les plus prévoyants ont apporté une chaise pliable, les autres s’assoient sur le sol ou les rochers. A 10 h 30, vêtus de leur robe noire ornée d’un col à rabat blanc, 25 pasteurs – hommes et femmes – arrivent en procession : le culte commence. Tout au long de la célébration, psaumes et cantiques s’enchaînent : on chante beaucoup, chez les protestants.
Après les lectures bibliques, la prédication. En chaire, Christian Krieger, président de la Fédération protestante de France, évoque également l’histoire. Toutefois, s’il faut être reconnaissant à « ceux qui nous ont précédés », il convient de ne pas se laisser enfermer dans le passé, prévient-il. Le pasteur en appelle donc à « une mémoire qui n’est pas une nostalgie, mais une énergie », et doit pousser à « s’engager au service du bien commun ».
Vient ensuite la cène. Malgré la mobilisation des deux douzaines de pasteurs qui distribuent à la chaîne le pain et le vin, il faut une demi-heure pour que tout le monde communie. C’est qu’il y a foule : environ 6 000 personnes participent au culte aujourd’hui, légèrement plus que les années précédentes.
Alors que la minorité protestante ne réunit que de 3 % à 4 % des Français – et environ moitié moins, si l’on s’en tient aux seuls réformés –, de nombreux participants se réjouissent que l’assemblée soit si nombreuse. « On fait masse. Ça fait plaisir, c’est rassurant. Ici, on n’est pas protestant seul ! », confie Samuel, un quadragénaire converti au protestantisme.
Vers 13 heures, après un dernier cantique, l’office s’achève. C’est l’heure du pique-nique et les fidèles s’égaillent sur les pelouses avant de sortir des victuailles de leurs sacs. Ici ou là, certains ont même emporté une glacière, d’où ils tirent une bouteille de rosé. Un peu à l’écart, enfin libres de se dégourdir les jambes, des enfants jouent à chat. Un groupe de Genevois se partage des sandwichs.
Le combat pour la liberté de conscience
Parmi eux, Catherine, la soixantaine. Comme d’autres participants venus de Suisse, des Pays-Bas ou d’Angleterre, une partie de ses ancêtres étaient des huguenots qui fuirent la France pour se réfugier à l’étranger. Elle vient donc « pour la foi », mais aussi « par fidélité et reconnaissance » vis-à-vis de ses lointains aïeux.
D’ailleurs, elle voit des parallèles entre ce qu’ils ont enduré et l’actualité. « Dans notre paroisse, il y a un Iranien converti au christianisme. S’il était resté dans son pays, il serait mort. Tous ces gens qui, à travers le monde, sont persécutés à cause de leur religion et doivent s’exiler ou se cacher, c’est la même chose que ce qui s’est passé ici », s’indigne-t-elle, avant de s’exclamer : « Le combat huguenot pour la liberté de conscience est très moderne ! » Laurent, quant à lui, a été ému par « toutes ces personnes qui chantent les psaumes avec cœur » et lui rappellent « les offices de [son] enfance ». Pour le sémillant octogénaire, cette journée est un « bain de jouvence ».
De bain de jouvence Agathe n’a pas besoin. Cette adolescente nîmoise distribue des cafés à la buvette tenue par les éclaireuses et éclaireurs unionistes de France – un mouvement scout protestant. Elle est une habituée de l’assemblée du Désert : sa grand-mère l’y a emmenée chaque année depuis ses 8 ans. Elle apprécie ce rendez-vous. « Il y a plein de chants, on rencontre des jeunes. C’est plus vivant, plus convivial que le culte du dimanche », assure la jeune fille, qui se dit profondément croyante mais ne se rend que rarement au temple.
Leur déjeuner avalé, une partie des visiteurs déambulent entre des stands où sont vendus des livres sur l’histoire protestante, quelques ouvrages religieux et des croix huguenotes – ce bijou, marqueur d’identité, omniprésent au cou des participants à l’assemblée.
D’autres préfèrent visiter le Musée du Désert. Cinq cousines retraitées, dont plusieurs viennent pour la première fois, examinent attentivement un grand mur sur lequel sont inscrits les noms de 5 000 « galériens pour la foi ». Soudain, l’une s’écrie : « Regardez, il y a notre nom : Tessier ! Et en plus, il vient de Vebron [Lozère], comme nous ! » Est-ce un de leurs ancêtres qui, il y a trois siècles, fut condamné à ramer sur les navires du roi ? Peut-être, et cela les émeut.
Tendre la main aux évangéliques
L’après-midi est essentiellement consacré à des conférences. Cette année, elles portent sur l’anabaptisme, un mouvement religieux né en 1525 qui refusait le baptême des enfants. L’anabaptisme étant précurseur des Eglises évangéliques, ce cinquième centenaire est l’occasion de leur tendre la main. Au sein du protestantisme français, la relation entre protestants « historiques » et évangéliques est un enjeu important. Alors que les premiers sont fragilisés par la sécularisation, les seconds connaissent un essor rapide.
Joëlle Sutter-Razanajohary, pasteure évangélique, est invitée à prendre la parole. Elle appelle à dépasser les sectarismes entre obédiences et lance un « pressant appel fraternel » aux luthéro-réformés : « Ne nous enfermez pas dans nos excès ! » Applaudissements nourris. Certains, toutefois, demeurent rétifs, reprochant aux Eglises évangéliques une spiritualité qui serait trop fondée sur l’émotion et une lecture parfois littéraliste de la Bible. Ainsi de Valérie : ayant adopté le protestantisme en raison de son « exigence intellectuelle », elle ne se sent « absolument aucune affinité » avec les évangéliques.
Le soleil commence à baisser et l’assemblée touche à son terme. Alors on chante encore un peu. Dans un languedocien qui n’est plus guère maîtrisé, on essaie d’entonner la Complainte des prisonnières de la tour de Constance exaltant le courage des huguenotes enfermées parce qu’elles refusaient d’abjurer. Puis, avant de se quitter, vient La Cévenole. « Le Dieu de nos pères n’est-il pas notre Dieu toujours ? », interroge la vieille chanson. Et la foi, de nouveau, se mêle à la mémoire.
Par Cyprien Mycinski pour Le Monde – septembre 2025
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Objectifs
- Se rappeler et se redire ce que signifie pour nous être baptisé, être chrétien, protestant, membre de l'Eglise.
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- Apprendre ensemble à parler avec simplicité de notre foi, devenir témoin, accompagner ceux qui sont en recherche, en questionnement, en demande.
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Ces rencontres sont proposées aux responsables et bénévoles des paroisses comme à tout paroissien qui souhaite rencontrer d'autres chrétiens et partager au sujet des questions de foi.
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Mercredi 19 novembre Schwindratzheim Foyer protestant
19h30 - 21h30 Collation à partir de 18h30
Jeudi 20 novembre Dettwiller Foyer paroissial
19h30 - 21h30 Collation à partir de 18h30
Vendredi 21 novembre Ingwiller Foyer protestant
19h30 - 21h30 Collation à partir de 18h30
Samedi 22 novembre Bouxwiller Foyer protestant
9h - 11h Collation à partir de 11h
3ème rencontre : « L'Evangile : Un mensonge à partager ? >>
Mercredi 21 janvier Schwindratzheim Foyer protestant
19h30 - 21h30 Collation à partir de 18h30
Jeudi 22 janvier Dettwiller Foyer paroissial
19h30 - 21h30 Collation à partir de 18h30
Vendredi 23 janvier Ingwiller Foyer protestant
Samedi 24 janvier Bouxwiller Foyer protestant
9h -11h Collation à partir de 11h
À noter : Une collation sera servie :
- dès 18h30 pour les rencontres débutant à 19h30
- Pour les rencontres proposées en matinée, la collation sera servie à l'issue de la rencontre.
Avec qui ?
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Dans la Bible, le témoin est une figure majeure. Mais à la différence des témoins qui s'exposent aujourd'hui et qui attirent l'attention sur eux-mêmes, le témoin biblique renvoie à un autre que lui. Il raconte son expérience, mais c'est pour mettre en avant le Dieu vivant qui a sauvé son peuple, le Christ qui l'a libéré, l'Esprit qui renouvelle son existence.
Être témoin, selon les Ecritures, ce n'est pas se placer au-dessus des autres en leur disant « moi, je vais vous dire la vérité » ; c'est recevoir avec d’autres l'Evangile, cette parole de confiance première, et c'est oser affirmer : « oui, cette parole me fait vivre » ...
Être Église, c'est être une communauté ouverte, une communauté de témoins...
Laurent Schlumberger
Pour tout renseignement complémentaire vous pouvez vous adresser à Élisabeth MUTHS, inspectrice de l'inspection de Bouxwiller au 07 82 19 09 70 ou par mail elisabeth.muths@uepal.fr
« Car j’avais faim et vous m’avez donné à manger, j’avais soif et vous m’avez donné à boire… » Matthieu 25, 36-37
L’Église évangélique luthérienne de Jordanie et de Terre Sainte est choquée et bouleversée par les images, les vidéos et les rapports faisant état d’une famine massive à Gaza.
Des mois de siège israélien ont empêché toute aide d’entrer à Gaza. Aujourd’hui, seule une aide insuffisante est autorisée à entrer, disponible uniquement dans quelques sites de distribution dangereux, inaccessibles à la plupart des gens. 113 Palestiniens, dont 81 enfants, sont déjà morts de faim : des dizaines au cours des derniers jours seulement. Un enfant sur cinq souffre de malnutrition sévère. Pendant ce temps, plus d’un millier de Palestiniens ont été tués et des milliers d’autres blessés par les forces israéliennes alors qu’ils cherchaient désespérément de l’aide pour eux-mêmes et leurs familles.
D’innombrables organisations humanitaires, dont les Nations unies, avertissent que cette famine provoquée par l’homme atteint un point de non-retour. Après leur visite à Gaza la semaine dernière, le patriarche grec orthodoxe Théophile III et le patriarche latin Pierbattista Pizzaballa ont rapporté que des personnes affamées attendaient pendant des heures sous le soleil dans l’espoir d’obtenir un morceau de pain. Ils sont les témoins oculaires du fait que la reprise de l’aide est une question de vie ou de mort.
Au nom de l’Église évangélique luthérienne de Jordanie et de Terre Sainte et de la communauté luthérienne mondiale, je condamne avec la plus grande fermeté cette politique d’extermination par la famine. Le gouvernement israélien utilise la faim comme une arme pour accélérer le nettoyage ethnique des Palestiniens de Gaza.
Nous appelons les gouvernements du monde entier, les chefs religieux, les organisations internationales et toutes les personnes de conscience à prendre toutes les mesures possibles pour mettre fin à ce siège meurtrier et permettre la libre circulation de l’aide humanitaire. À l’heure actuelle, des fournitures vitales restent inutilisées dans des entrepôts situés à quelques kilomètres seulement de ceux qui en ont besoin à Gaza. Israël doit subir des pressions pour permettre aux organisations humanitaires de reprendre une distribution sûre, digne et efficace de l’aide.
Comme l’a déclaré Sa Béatitude Théophile III après sa visite à Gaza, le silence face à la souffrance est une trahison de la conscience. Comme l’a dit le patriarche cardinal Pizzaballa, nous ne pouvons pas rester neutres.
Notre Seigneur Jésus nous a enseigné à prier : « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour ». Aujourd’hui, nous prions pour notre peuple à Gaza, afin qu’il puisse avoir son pain quotidien. Nous prions pour que la nourriture parvienne à ceux qui ont faim, que l’eau parvienne à ceux qui ont soif et que les médicaments parviennent à ceux qui sont malades. Nous appelons à un cessez-le-feu immédiat, à la fin de ce génocide et à ce que la justice advienne sur notre terre.
Sani Ibrahim Azar
Évêque de l’Église évangélique luthérienne en Jordanie et en Terre Sainte
Notes complémentaires :
Cette déclaration a été publiée sur les réseaux sociaux le vendredi 25 juillet 2025 (page Facebook de l’Eglise évangélique luthérienne en Jordanie et en Terre Sainte : https://www.facebook.com/elcjhl ).
Le texte fait allusion à la visite des communautés chrétiennes de Gaza, le 18 juillet et la jours suivants, par le patriarche grec-orthodoxe de Jérusalem Théophile III et le cardinal Pizzaballa (patriarche latin de Jérusalem, Eglise catholique). Cette visite s’est faite au lendemain de la frappe israélienne qui a touché l’église catholique de la Sainte-famille à Gaza, tuant trois personnes et faisant plusieurs blessés.
Six établissements gérés par l’agence de l’ONU : UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) ont été fermés sur décision israélienne.
Depuis le 7 octobre 2023, la guerre à Gaza a également des répercussions dramatiques en Cisjordanie où se déroulent de nombreuses exactions armées.
La limitation de la liberté de déplacement, la confiscation de terres, la destruction d’infrastructures et la chute du tourisme ont engendré une grave crise économique. Par la force des choses, de nombreuses familles palestiniennes ont perdu la possibilité de travailler et connaissent des difficultés sociales importantes.
Église évangélique luthérienne de Jordanie et de Terre sainte (ELCJHL – dont le site internet est ICI) accueille en Cisjordanie 1.250 élèves dans ses 3 écoles principales, qui sont à la fois des lieux d’enseignement et de promotion de la paix.
De nombreuses familles n’ont plus les moyens d’assumer les frais de scolarité.
L’Église luthérienne continue d’accueillir leurs enfants, comptant sur notre soutien pour être en capacité de poursuivre sa mission éducative.
Comme les autres parents d’élèves, Feras, boulanger, ne donne pas son nom, par crainte d’être ensuite menacé par les services de sécurité israéliens pour avoir parlé à la presse. Sa fille de 13 ans n’a pas effectué sa rentrée scolaire, lundi 1er septembre. Comme 300 enfants du camp de réfugiés de Chouafat, où sont entassées plus de 30 000 personnes entre les hauts murs de l’enceinte en béton qui sépare le quartier du reste de Jérusalem-Est, occupé illégalement par Israël depuis 1967. « J’ai cherché, mais je n’ai pas trouvé de place », se désole le père de famille, installé dans une des ruelles de l’enclave.
Ce lundi aurait dû être une journée banale de rentrée scolaire, comme pour plus de 2 millions d’élèves en Israël et dans les territoires annexés de Jérusalem-Est. Mais six écoles gérées par l’agence des Nations unies pour les territoires occupés (UNRWA) sont restées portes closes à Jérusalem-Est, dont trois dans le camp de réfugiés de Chouafat, une poche de pauvreté, et désormais de criminalité, délaissée par Israël depuis des années. « Beaucoup de parents m’ont prié de prendre leurs enfants. Je voudrais bien, mais je n’ai pas assez de place », regrette la directrice d’une école en faisant écouter un message tout juste enregistré sur sa boîte vocale : « C’est une mère qui appelle à l’aide. » A l’échelle de Jérusalem, ils seraient ainsi 600 sans affectation, selon les ONG, amplifiant l’absentéisme, plus élevé que dans le reste de la ville, mieux dotée sur le plan scolaire.
La fermeture des écoles remonte au mois de mai. Des militaires israéliens avaient effectué un « raid » pour venir fermer toutes les écoles de l’UNRWA à Jérusalem-Est. Les autorités expliquaient alors appliquer une loi votée en 2024 interdisant toute activité de l’agence des Nations unies sur le sol israélien, une mesure de rétorsion décidée après le 7 octobre 2023 au motif, selon Israël, que des employés de l’UNRWA avaient été impliqués dans l’attaque terroriste lancée par le Hamas depuis Gaza – ce que l’agence a démenti, après enquête, en dehors d’une poignée d’individus.
Des recours ont été déposés, notamment par l’Association des droits civiques d’Israël (ACRI), contre la décision de fermeture des écoles, sans résultat pour l’instant. La Cour suprême devrait se prononcer le 16 septembre. Interrogée, la municipalité de Jérusalem explique avoir encouragé les inscriptions en amont et insiste sur le fait que « chaque étudiant qui a réclamé une place dans une école municipale a reçu une réponse ». L’engagement laisse dubitatives les associations et les Nations unies qui constatent, sur le terrain, le décrochage de nombreux enfants et des conditions d’enseignement particulièrement dégradées au sein de plusieurs écoles. « Lorsque nous avions écrit à la municipalité et au ministère de l’éducation, ils nous avaient garanti qu’ils avaient une solution pour chaque enfant. Cela n’a pas été le cas », souligne Tal Hassin, au nom de l’ACRI.
Une partie des familles refusent de scolariser leurs jeunes enfants à l’extérieur du camp parce que cela supposerait de franchir, deux fois par jour, un checkpoint tenu par des militaires israéliens. « Il s’avère que pour beaucoup de ces enfants, il n’y a pas vraiment d’alternative à nos écoles, en particulier dans le camp de Chouafat, relève Roland Friedrich, directeur de l’UNRWA pour la Cisjordanie. La municipalité, dès l’année dernière, a fait beaucoup d’annonces concernant la mise à disposition de places dans des écoles alternatives, l’octroi de budgets, la mise en place de moyens de transport. Nous n’avons encore rien vu de tout cela. »
« Ils veulent nous effacer »
Les ONG replacent la fermeture des écoles de l’UNRWA dans un contexte plus large. L’association israélienne Ir Amim, qui effectue un travail reconnu sur Jérusalem, insiste sur la stratégie agressive des autorités en matière scolaire. « Israël fait beaucoup d’efforts pour que les enfants suivent un programme israélien, y compris les écoliers palestiniens. Toute nouvelle école ouverte par l’Etat n’est destinée qu’au programme scolaire israélien, relève Oshrat Maimon, directrice juridique d’Ir Amim. Cette politique oblige les parents, les élèves et les enseignants palestiniens à choisir entre continuer à subir de graves pénuries dans les salles de classe, la surpopulation et la vétusté des installations, ou abandonner le programme scolaire palestinien, qui est ancré dans leur identité nationale et leur patrimoine culturel. »
Dans le petit groupe de parents et d’habitants qui discutent autour du boulanger, un professeur de mathématiques, diplômé de l’école de l’UNRWA trente-cinq ans plus tôt, s’inquiète à l’idée que les enfants des réfugiés perdent ainsi une part de leur culture : « Ils s’en prennent à l’UNRWA, mais c’est plus profond que ça : ils ne veulent plus des réfugiés, ils veulent nous faire disparaître, ils veulent nous effacer en tant que Palestiniens et réfugiés », relève l’enseignant. Un sexagénaire, électricien, abonde : « Conserver l’UNRWA, c’est montrer que les réfugiés sont toujours là. S’ils pouvaient même effacer le mot, ils le feraient. Alors, ils font partir l’UNRWA, ils réduisent l’instruction de nos enfants ou nous obligent à leur faire suivre leur programme. »
Luc Bronner du Monde, septembre 2025
Son statut de « commandeur des croyants » vaut au souverain marocain une aura particulière. Il lui permet aussi de contrer les ambitions des islamistes, dont il rejette le projet politique et la manière de vivre.
Si Paris vaut bien une messe, Casablanca vaut bien une fatwa. Le 26 février, le roi Mohammed VI du Maroc s’adresse à ses sujets en tant que « commandeur des croyants ». Il leur demande de ne pas sacrifier de moutons, comme le veut la tradition, pour l’Aïd-el-Adha, la « fête du sacrifice », prévue en juin, qui commémore le sacrifice d’Abraham. La raison de cette entorse au rituel ? « Notre pays affronte des défis climatiques et économiques qui ont eu pour conséquence une régression substantielle du cheptel », précise le roi dans un discours lu à la télévision publique par le ministre des affaires religieuses. « L’accomplissement [du rituel de l’Aïd] dans ces conditions difficiles est susceptible de porter préjudice » à une grande partie des habitants du pays, « particulièrement ceux à revenu limité », ajoute le souverain chérifien. Après sept années de sécheresse d’affilée, le nombre de têtes de bétail s’est, de fait, effondré, faisant flamber les prix.
Le 7 juin, jour de l’Aïd-el-Adha, Mohammed VI assiste à la prière. Il procède ensuite, comme le faisait le prophète Mahomet, au sacrifice de deux béliers, l’un pour sa famille, l’autre pour la communauté, devant les caméras de la télévision nationale. La plupart de ses compatriotes ont respecté sa recommandation, évitant ainsi de débourser de 6 000 à 7 000 dirhams (de 600 à 700 euros) pour un animal, alors que le salaire minimum est inférieur à 300 euros par mois.
Aucune polémique, aucune récrimination. Ce n’est pas la première fois que la population est appelée à la frugalité à l’occasion de l’Aïd : Hassan II, le père de Mohammed VI, avait déjà interdit le sacrifice à trois reprises : en 1963, à cause de la « guerre des sables » avec l’Algérie ; en 1981 et en 1996, en raison, déjà, de sécheresses dévastatrices Aucun autre dirigeant musulman ne s’est risqué à émettre une telle recommandation aux fidèles, de peur d’encourir les foudres des oulémas (savants religieux) ou des islamistes. Mais il faut dire qu’aucun ne dispose non plus d’une légitimité religieuse identique à celle du commandeur des croyants, dont la dynastie est réputée remonter jusqu’à la famille du Prophète.
« Pas une fonction religieuse »
Rappelons aussi que ce titre renvoie à un passé glorieux dans le monde arabo-musulman : l’époque des califes ayant succédé à Mahomet, au VIIe siècle. Quel dirigeant arabe ou musulman pourrait se prévaloir d’un tel prestige ? Pas même les Saoudiens, si prompts à se présenter comme les « gardiens des deux lieux saints », La Mecque et Médine. Pour l’islamologue et politologue franco-marocain Rachid Benzine, le pouvoir du roi s’étend au-delà des seuls musulmans : « En tant que commandeur des croyants, il commande aussi aux juifs et aux chrétiens, considérés comme des croyants dans l’islam. » Même si ces minorités sont très limitées – 30 000 chrétiens et de 1 500 à 2 000 juifs vivent dans ce pays de plus de 38 millions d’habitants –, cette affirmation illustre l’étendue de son influence. En somme, le commandeur des croyants est le « commandeur des Marocains », de tous les Marocains. Mais son influence ne dépasse pas les frontières du royaume, à l’exception de celle qui est exercée sur les nombreux émigrés, en particulier en Europe.
« Comprendre le titre de “commandeur des croyants” comme une fonction religieuse est un contresens, décrypte le politologue Youssef Belal, spécialiste de l’islam marocain. C’est un rôle de commandement, mais, dans la réalité, ce sont les oulémas qui ont le pouvoir religieux entre leurs mains. Ce titre permet surtout au roi de se placer au-dessus du jeu politique et constitutionnel. » Au départ, c’est le maréchal Hubert Lyautey (1854-1934), grand architecte du protectorat français au Maroc, qui eut l’idée d’insister sur la dimension religieuse du sultan du Maroc (le terme employé, plutôt que celui de « roi », avant l’indépendance), afin de mieux le tenir éloigné de la réalité des affaires politiques. « On s’est attaché d’abord à rehausser le prestige personnel du sultan en faisant revivre autour de lui les anciennes traditions et le vieux cérémonial de cour, à garantir scrupuleusement l’autonomie de son pouvoir religieux, à raffermir sa confiance et son autorité en l’associant à nos projets, en sollicitant ses réflexions et avis », écrit Lyautey, en 1914, dans son Rapport général sur la situation du protectorat du Maroc. Le maréchal dessina lui-même le drapeau national, une étoile verte à cinq branches (comme les cinq piliers de l’islam) sur bannière rouge, la couleur de la dynastie alaouite.
L’officialisation de la qualité de « commandeur des croyants » intervient bien plus tard, et doit tout au génie politique de Hassan II. Au début des années 1960, celui-ci n’est encore qu’un jeune souverain contesté par le Parti de l’Istiqlal (« indépendance »), qui réclame un partage du pouvoir au nom de son rôle dans la lutte pour l’indépendance, acquise en 1956. Soucieux de consolider son emprise sur le pays, Hassan II prend alors l’initiative d’inscrire dans la Constitution de 1962 la fameuse règle qui fait de lui le commandeur des croyants. Ce qui était tacite depuis Lyautey est désormais gravé dans le marbre. Un autre article ajouté à la Constitution présente la personne du roi comme « inviolable et sacrée ».
Destiné, à l’origine, à contrer les revendications de la gauche en faveur d’une république, ce titre sera bien utile, à partir des années 1980, lorsqu’il faudra contenir la menace islamiste, de plus en plus marquée, au Maroc, dans le monde arabe et en Europe. Hassan II en use d’ailleurs – et ne se prive pas de le faire savoir – pour dénouer la crise provoquée en France par des lycéennes franco-marocaines voilées, à Creil (Oise), en 1989. Grâce à son conseil « paternel », les jeunes filles en question acceptent de retirer leur foulard en classe. Hassan II, qui a fait bâtir à Casablanca une gigamosquée portant aujourd’hui son nom, s’intéressait tant aux questions religieuses qu’il avait invité le pape Jean Paul II dans son pays, en 1985. Lors de cette visite, rarissime en terre musulmane, le souverain pontife polonais s’était adressé à 80 000 jeunes musulmans rassemblés dans le stade de Casablanca. « Le dialogue entre chrétiens et musulmans est aujourd’hui plus nécessaire que jamais », avait-il déclaré à la foule. Trente-quatre ans plus tard, en mars 2019, un autre pape, François, s’est rendu au Maroc, cette fois à l’invitation de Mohammed VI, pour transmettre le même message devant 25 000 personnes, à Rabat.
Formé à l’école coranique parallèlement à ses études profanes au Collège royal, Mohammed VI n’a pas vraiment innové en matière de religion. Disons plutôt qu’il a placé ses pas dans ceux de son père. Hassan II avait instauré un cycle de conférences télévisées pendant le ramadan, intitulé les « Dourous hassaniya » (que l’on peut traduire par les « leçons hassaniennes », mais qui est aussi un jeu de mots sur le prénom du roi et sur hassana, signifiant « bonnes actions »), durant lesquelles il aimait à discourir sur des sujets religieux. Mohammed VI a maintenu la tradition, tout en se tenant davantage en retrait, se contentant le plus souvent de poser des questions à des « savants » et d’écouter. « C’est devenu un rituel de la mise en scène, explique un observateur de la scène religieuse. Mohammed VI n’a pas d’appétit pour la question religieuse. Il exerce sa fonction en respectant le rituel. Cela se limite à cela. »
Pas question, pour autant, d’aller jusqu’à reconnaître une véritable liberté de conscience aux Marocains – et donc celle de ne pas croire en Dieu –, ce qui risquerait d’affaiblir son statut de commandeur des croyants. L’échec de la tentative d’insérer cette notion de liberté dans la Constitution, lors de la révision de 2011, a souligné les limites de l’ouverture du royaume dans ce domaine. Les progressistes marocains ont vécu cet échec comme une amère défaite. Malgré tout, l’islam pratiqué dans leur pays demeure tolérant et pragmatique, comme l’atteste la recommandation du roi sur le sacrifice pour l’Aïd-el-Adha.
Si le commandeur des croyants est tenu de faire bonne figure en public, sa vie privée n’appartient qu’à lui. Une courte vidéo captée en août 2022 par un automobiliste parisien, et largement commentée sur les réseaux sociaux, le montre titubant légèrement, un verre à la main, à la sortie d’un établissement nocturne. De source proche du cercle royal, les soirées au palais jusqu’à la fin des années 2010 étaient passablement arrosées, pas tant par le roi lui-même que par ses proches conseillers. Cela a changé depuis qu’il s’entoure de combattants d’arts martiaux mixtes, adeptes d’une hygiène de vie sportive et pratiquant une religiosité populaire, plus rigide que celle de la haute bourgeoisie de Rabat ou de « Casa ». Au pays, tout cela est de notoriété publique, mais personne n’a jamais reproché ces entorses, du moins à haute voix. Et d’ailleurs, qui ne s’arrange pas, à un moment ou à un autre, avec les règles religieuses ?
Si l’islam est privé, l’islamisme, lui, concerne au plus haut point l’avenir de la royauté. Or, assure un proche, « Mohammed VI a horreur des islamistes, il les abhorre », tant leur projet politique que leur manière de vivre. Depuis l’effondrement des idéologies inspirées par le nationalisme arabe et le marxisme, depuis que l’armée n’est plus sortie des casernes, le fondamentalisme religieux est la principale menace pour le trône. Au Maroc, il se divise en trois branches : les légalistes du Parti de la justice et du développement (PJD), intégrés au jeu politique ; les réfractaires du mouvement, non reconnu mais toléré, Al-Adl wal-Ihsane (Justice et bienfaisance), dont le fondateur, cheikh Abdessalam Yassine (1928-2012), n’a jamais approuvé la qualité de commandeur des croyants attribuée au roi ; et enfin les insurgés que sont les djihadistes, affiliés à Al-Qaida ou à l’organisation Etat islamique.
Riposte au terrorisme
Le 11 septembre 2001, lorsque les tours du World Trade Center, à New York, s’effondrent sous les yeux du monde entier, Mohammed VI ne veut pas croire que son pays sera entraîné dans la tourmente. Un mois et demi plus tard, interrogé par la journaliste française Anne Sinclair pour le compte de l’hebdomadaire Paris Match, il décrit un Maroc épargné par les soubresauts. « Je ne vois vraiment pas où est la menace islamiste !, s’exclame-t-il. Je me promène dans mon pays, sans aucun problème. Je n’ai pas augmenté l’effectif de ma sécurité… Ici, les gens qui ont envie d’être barbus ont le droit de porter la barbe, les femmes qui ont envie de se voiler le visage en ont le droit. » Afin de faire pièce à la guerre de civilisation qui pointe, le palais met en avant le dialogue interreligieux, mis en scène par son conseiller juif, André Azoulay.
Cette illusion de quiétude vole en éclats le 16 mai 2003. Une douzaine de terroristes, issus pour la plupart du bidonville casablancais de Sidi Moumen ou du département français des Yvelines, commettent cinq attentats-suicides presque simultanés en visant des cibles juives, touristiques et étrangères à Casablanca, la capitale économique du royaume. Le bilan est de 33 morts et d’une centaine de blessés. Il aurait pu représenter le triple si les auteurs n’avaient pas fait preuve d’une forme d’amateurisme – le cimetière juif était vide, et un centre hébraïque fermé le vendredi soir. Moins d’un an plus tard, le 11 mars 2004, une cellule terroriste composée de plusieurs dizaines de personnes, en majorité des Marocains, fait exploser des bombes dans plusieurs sites à Madrid, dont la gare d’Atocha, tuant près de 200 personnes. Une attaque revendiquée par Al-Qaida. Le royaume de Mohammed VI ne peut plus se réfugier derrière les explications habituelles du type « ces gens n’ont rien à voir avec l’islam ».
Au Maroc, la riposte des autorités sera à la fois sécuritaire et politique. La traque des cellules djihadistes s’intensifie. Les arrestations se comptent par milliers, les condamnations, par centaines. Rabat accueille certains vols secrets de la CIA, l’agence centrale du renseignement américaine, destinés à transférer de présumés terroristes vers des sites où ils seront interrogés et torturés en toute discrétion. A la manœuvre, un trio qui est encore en place de nos jours. Fouad El-Himma, plus proche conseiller et ami d’enfance du roi, assure la coordination de l’architecture sécuritaire du pays, d’abord en tant que numéro deux du ministère de l’intérieur (1999-2007), puis comme conseiller principal de Mohammed VI. Yassine Mansouri, lui aussi issu du Collège royal, pilote depuis 2005 la direction générale des études et de la documentation, autrement dit le renseignement extérieur. Abdellatif Hammouchi agit en tant que patron de la direction générale de la surveillance du territoire, le renseignement intérieur, poste qu’il occupe depuis 2005 – il deviendra patron de la direction générale de la sûreté nationale (police nationale) en 2015.
Après les attentats de 2003, les mosquées sont reprises en main, et les confréries soufies, perçues comme un rempart à l’islamisme, remises au goût du jour. Tous les imams ne sont pas « fonctionnarisés », mais il leur faut tous obtenir une autorisation pour prêcher. Les prêches, sans faire l’objet d’une autorisation préalable, doivent respecter certaines « lignes rouges », à commencer par la légitimité de la monarchie. Un nouveau Conseil supérieur des oulémas – présidé par le roi en personne – est instauré en 2009, de même qu’un Institut Mohammed-VI de formation des imams, en 2014. Ce dernier sera renforcé en 2015 par la Fondation Mohammed VI des oulémas africains, destinée à diffuser la version marocaine d’un islam du « juste milieu ». Au fil du règne de Mohammed VI, l’islam est ainsi devenu un outil du soft power marocain en Afrique.
Réforme du code de la famille
L’ouverture aux autres religions ajoute à la réputation internationale du Maroc. Depuis 1962, la Constitution édicte que l’Etat « garantit le libre exercice des cultes ». Certes, les lois fondamentales de l’Algérie et de la Tunisie en font de même. Mais, dans la pratique, le royaume s’est distingué en abritant, en 2012, un centre de formation théologique chrétien – fait unique dans un pays musulman. Installée à Rabat, cette institution, baptisée « Al-Mowafaqa » (« l’accord »), prépare à une licence de théologie en liaison avec l’Institut catholique de Paris et la Faculté de théologie protestante de l’université de Strasbourg. Ainsi se forme localement une partie du « personnel » religieux destiné à encadrer le réveil spectaculaire du christianisme dans le royaume, nourri par les flux de migrants subsahariens de confession catholique ou protestante. Avec des limites, tout de même : les cadres diplômés d’Al-Mowafaqa sont exclusivement des non-Marocains.
Le commandeur des croyants surveille de près le risque d’une « contagion » des nationaux musulmans par cette renaissance chrétienne aux couleurs africaines. Le prosélytisme est proscrit par la loi ; l’article 220 du code pénal prévoit des peines d’emprisonnement de « six mois à trois ans » pour quiconque « emploie des moyens de séduction dans le but d’ébranler la foi d’un musulman ou de le convertir à une autre religion ». Illustration de l’extrême sensibilité du sujet, le gouvernement avait expulsé, en 2010, plusieurs dizaines de missionnaires – principalement américains – d’Eglises évangéliques opérant, sous le couvert d’actions humanitaires, dans les villages pauvres du Moyen Atlas. Désagréablement surpris par cette décision, alors que les relations entre Washington et Rabat étaient étroites, l’ambassadeur américain avait protesté. Autre indice de la nervosité permanente des autorités face au risque d’« ébranlement de la foi » : à chaque célébration de Noël, un policier en civil filme l’assistance des fidèles rassemblés à la cathédrale de Rabat, au cas où des convertis ayant quitté l’islam s’y mêleraient. L’existence de cette communauté quasi clandestine de transfuges, évaluée entre 2 000 et 6 000 personnes, dont les représentants se plaignent de persécutions de la part de la police tout autant que de l’ostracisme de la société, demeure un tabou au pays du commandeur des croyants.
Mais, en deçà des fameuses « lignes rouges », bien des choses restent possibles, comme l’a montré le chantier des droits de la femme. Dès 2003, le roi avait défini ainsi sa marge de manœuvre : « Je ne peux autoriser ce que Dieu a prohibé ni interdire ce que le Très-Haut a autorisé. » Un an plus tard, il fait adopter par le Parlement la réforme de la Moudawana, ce code de la famille qui infériorise la femme. « Cette réforme correspond aux convictions profondes de Mohammed VI, c’est aussi une réponse aux attentats de Casablanca », analyse Youssef Belal. Il faut se rappeler que l’une des premières mesures de Mohammed VI à son accession au trône, en 1999, avait consisté à dissoudre le harem royal de son père.
La nouvelle Moudawana est audacieuse. Elle restreint la polygamie, relève à 18 ans l’âge minimum légal du mariage (contre 15 ans auparavant), supprime le statut de « chef de famille » accordé jusque-là au mari, permet à une femme de divorcer au cas où son mari souhaiterait prendre une deuxième épouse… Mais, dans les faits, elle est mal appliquée par une magistrature très conservatrice. Le symbole n’en reste pas moins important, autant que les dispositions. Sous l’impulsion du roi, une « Moudawana 2 » est d’ailleurs en préparation pour compléter et améliorer la réforme précédente. « L’idée est d’offrir une meilleure protection à la femme et aux enfants en cas de divorce, précise Rachid Benzine. Le roi aurait aimé aller plus loin, mais il faut tenir compte des tensions et pesanteurs de la société. » Ainsi sera-t-il difficile de remédier aux inégalités hommes-femmes en matière d’héritage, tant le texte coranique est précis sur ce point.
Au Maroc, comme ailleurs dans le monde arabe (Tunisie, Egypte), les premiers à avoir profité des « printemps arabes » de 2011 furent les islamistes, en particulier le PJD. Ce parti affilié aux Frères musulmans s’était tenu à l’écart, au nom de la stabilité du royaume, des manifestations étudiantes, de janvier à mars, réclamant plus de libertés et d’équité. Mais c’est lui qui a récolté les fruits de la contestation, puis de la réforme constitutionnelle de juillet, en arrivant largement en tête des législatives organisées au mois de novembre de la même année.
A l’époque, cette victoire est un coup de tonnerre. Pour la première fois, les islamistes sont le premier parti du Maroc. Le secrétaire général du parti, Abdelilah Benkirane, est nommé premier ministre, conformément à la nouvelle Constitution. A la tête d’un gouvernement de coalition dans lequel les islamistes tiennent le haut du pavé, il tranche avec ses prédécesseurs. C’est une « grande gueule », un personnage truculent, réputé pour son sens de la formule. « Ses discours étaient très suivis par la population, note un politologue. Le roi en a pris ombrage. » Tout en faisant allégeance au pouvoir royal, Abdelilah Benkirane multiplie les piques. Quand on lui demande s’il a sollicité l’autorisation du roi pour se représenter aux législatives de 2016, il répond, bravache : « Je n’ai besoin que de l’autorisation de ma mère. » L’homme a du caractère, il n’hésite pas à mettre sur la place publique ses désaccords avec le palais, qui portent sur les choix budgétaires et les orientations de politique générale. La religion n’est pas un terrain d’affrontement entre les deux hommes, du moins publiquement.
Jeu d’usure
Si le bilan du gouvernement Benkirane est assez décevant, la popularité de son parti demeure intacte. En 2016, le PJD remporte les législatives avec encore plus de voix qu’en 2011. Ce succès est un coup dur pour Mohammed VI. Décidé à imposer une guerre d’usure aux islamistes, le souverain commence par inciter ses alliés au Parlement à refuser toute nouvelle coalition tant que Benkirane sera en poste. Finalement, le PJD plie et désigne Saad-Eddine Al-Othmani chef du nouveau gouvernement. Plus terne et moins rétif que Benkirane, il va poser moins de problèmes au palais, qui regagne peu à peu toutes ses prérogatives d’avant la Constitution de 2011. « Mohammed VI a véritablement usé les islamistes, comme Mitterrand l’avait fait pendant la cohabitation avec Chirac », se souvient, en connaisseur, l’ancien ministre des affaires étrangères français (1997-2002) Hubert Védrine, qui a toujours gardé un œil intéressé sur les péripéties du royaume. Entre 2016 et 2021, le palais pousse le gouvernement à faire adopter quatre mesures qui minent profondément la popularité des islamistes : l’arrêt des subventions aux carburants, la légalisation du cannabis thérapeutique, le renforcement de la place du français dans l’enseignement public et, enfin, la normalisation des relations avec Israël.
« La stratégie de la monarchie consiste précisément à faire endosser le coût politique des décisions par un gouvernement bouclier, qui la met à l’abri de la contestation directe », écrivait déjà Youssef Belal dans un article sur « L’islam politique au Maroc » dans la revue Pouvoirs, en 2013. Après deux législatures éreintantes, le PJD perd largement les élections de 2021 au profit du Rassemblement national des indépendants, une formation pilotée par un proche du roi, l’homme d’affaires Aziz Akhannouch. En douceur et sans recourir à l’arme de la répression, Mohammed VI a su éteindre la flamme islamiste, du moins sa frange légaliste et partisane. Mais le feu couve toujours sous la cendre. Le mouvement Al-Adl wal-Ihsane, sans reconnaissance légale mais toléré par le pouvoir, reste un grand point d’interrogation.
En janvier 2015, après les attentats visant notamment l’hebdomadaire Charlie Hebdo, des policiers et un magasin Hyper Cacher, à Paris, Mohammed VI n’avait pu se permettre de s’afficher, avec les autres chefs d’Etat, à l’immense manifestation de solidarité organisée dans la capitale française, son statut de commandeur des croyants lui interdisant de défendre le droit au blasphème. On le dit aussi choqué et alarmé, en privé, par le tour que prend le débat sur l’islam en France, attisé par une partie de la droite et de l’extrême droite, ainsi que par certains médias de la sphère Bolloré. « Le rappeur Maître Gims, avec lequel il s’entretient de façon régulière, a pu le conforter dans cette vision d’une France de plus en plus raciste et islamophobe », assure un diplomate français.
Ironie de l’histoire : les partis qui attisent le plus les crispations identitaires autour de l’islam, le Rassemblement national et Les Républicains, sont les plus promarocains de l’espace politique français. Ils ont régulièrement reçu un bon accueil à Rabat. Nicolas Sarkozy, le premier à lancer le débat sur l’« identité nationale » en France, à la fin des années 2000, passe souvent des vacances dans des palais mis à sa disposition par Mohammed VI. Quant à Jean-Claude Martinez, ancien vice-président du Front national (1985-2008), il a publié, en 2015, une biographie dithyrambique du souverain marocain, Mohammed VI. Le roi stabilisateur (éditions Jean-Cyrille Godefroy). Ce n’est que le énième paradoxe de ce roi qui s’inquiète des extrêmes en France mais leur déroule le tapis rouge chez lui. Un roi plus modeste et accessible que son père, mais beaucoup plus riche et lointain que lui. Un roi qui s’autorise audaces et libertés, mais n’en accorde pas tant que ça à ses sujets. Un roi libéral qui a éteint toute forme d’opposition dans son pays. Un roi, enfin, qui n’aime guère gouverner, mais se délecte à régner.
Le Monde d’août 2025, Christophe AYAD et Frédéric BOBIN
Les Équipes Unionistes Luthériennes (EUL), mouvement de jeunesse protestante engagé depuis un siècle, célébreront leur centenaire les samedi 23 et dimanche 24 mai 2026 à Neuwiller-lès-Saverne.
Sous le thème « 100 ans pour grandir ensemble », cet événement unique sera l’occasion de revenir sur un siècle d’engagement au service des jeunes, autour des valeurs d'éducation populaire, de solidarité et d’ouverture.
Nous vous invitons chaleureusement à rejoindre cette grande fête conviviale et fédératrice, ouverte à toutes et tous : anciens, familles, jeunes et partenaires. Que vous souhaitiez simplement participer ou vous engager comme bénévole, votre énergie et votre enthousiasme seront précieux pour faire de ces journées un succès.
Dès la rentrée, vous pourrez retrouver toutes les informations sur le programme d’activités de l’année : week-ends pour catéchumènes, rencontres pour animateurs et animatrices bénévoles, participation à la rencontre internationale de Taizé à nouvel an, retraites de Pâques pour adultes et familles, et bien plus encore.
Toutes les informations pratiques, le programme détaillé du centenaire et les modalités de bénévolat seront disponibles dès octobre sur le site officiel : www.eul.alsace.
Réservez d’ores et déjà ces dates dans vos agendas, et préparez-vous à célébrer avec nous 100 ans d’histoire et d’avenir partagés !
Barbara Siéwé,
Pasteure secrétaire générale des EUL
Le service protestant de l'enseignement religieux cherche des intervenants.
L’enseignement religieux protestant recherche des futurs intervenants de religion en Alsace et en Moselle. Il s’agit d’assurer une ou plusieurs heures rémunérées de culture religieuse protestante dans les écoles élémentaires publiques tout au long de l’année scolaire en accord avec le statut local.
Vous serez valorisés et accompagnés à travers une formation diplômante. Pour tous renseignements, veuillez nous contacter via l’adresse mail : sper@uepal.fr
Le service protestant de l’enseignement religieux vous recevra et vous présentera l’Enseignement religieux protestant.
Liste des nouveaux pasteurs, changements de paroisses, départs à la retraite, etc.
Comme chaque année, voici la liste des mouvements des pasteurs au sein de l’Union des Églises protestantes d’Alsace et de Lorraine. Cette liste recense les nouveaux pasteurs, les changements de paroisses, les départs à la retraite, etc. (au 1er septembre 2025 – sauf mention contraire).
Candidat(e)s ayant obtenu le Certificat d’Aptitude aux Fonctions Pastorales (CAFP), qui sont nommé(e)s pasteur(e)s :
Olivier Lacroix : Woerth
Maria Lavina : Sarrebourg (Moselle Sud)
Rosner Lormil : Riedisheim-Rixheim
Kodzo Agbemedi Agbi-Awume : Munster
Bertrand Mathys : Mulhouse (réformé)
Ont été reconnu(e)s comme ministres particuliers le 29 juin 2025 à Oberbronn :
Animateur·trices communautaires : Nathalie Brahimi-Cronmuller, Guy Drommer, Carmen Eschenbrenner, Daniel Horn, Jean-Daniel Toureille
Aumônier : Reine Djotang-Ngia
Diacre : Inmi Agadé
Prédicateur·trices : Sylvie Albecker, Raoul Djeutané, Robert Feige, Madeleine Rempp, Sylvie Speckel, Jean-Daniel Toureille
Seront ordonnés le 19 octobre 2025 à Mulhouse :
Olivier Lacroix, Maria Lavina, Bertrand Mathys
Seront accueillis en la même occasion :
Kodzo Agbemedi Agbi-Awume, Rosner Lormil
Formation Initiale des Pasteurs (FIP) au 1er septembre 2025 :
FIP 1 (stage accompagné) :
Nicolas Bedo, auprès de la Pasteure Laurence Hahn, Wangen
Marie Fritsch, auprès de la Pasteure Patricia Rohrbacher, Schweighouse-sur-Moder
Jade Jessel, auprès du Pasteur David Prekel, Oberhausbergen
Noé Mangallon, auprès de Dedenyo Nomenyo, Entzheim
FIP 2 (Poursuite du stage accompagné) :
Timothée Beroud : auprès du Pasteur Philippe Eber (Strasbourg St-Pierre-le-Jeune).
Parcours aménagé :
Quentin Dijoux, auprès du Pasteur Jean-Philippe Lepelletier, Sainte-Marie-aux-Mines
Andry Habberstad, auprès de la Pasteure Anne Westphal, Soultzeren
Kévin Button, auprès du Pasteur Alain Spielewoy, Strasbourg Saint-Matthieu
FIP 3 (Stage en autonomie) :
Edith Antoni : Sarre-Union
Marie-Claire Helmlinger : Langensoultzbach
Thierry Larcher : Horbourg
Juliette Marchet : Strasbourg-Bouclier
Sony Ndagho Tshita : Mulhouse (réformé)
Solène Rossa : Boofzheim
Orlane Martin de Lassalle : Hirschland & Weyer
Départs à la retraite :
Pasteurs :
Au 1er février 2025 : Claude Conedera
Au 1er juin 2025 : Marc Muller-Mauler
Au 1er juillet 2025 : Sylvie Foell Merida, Marc Fritsch, Danièle Kopp, Pierre Kopp
Au 1er août 2025 : Annette Goll, Monika Garruchet (en congé), Danielle Hauss-Berthelin
Au 1er septembre 2025 : Daniel Priss, Pascale Schneikert
Au 1er octobre 2025 : Georges Hufschmitt
Au 1er novembre 2025 : Hubert Freyermuth, Ulrike Richard-Molard
Autres ministres :
Au 1er janvier 2026 : Odile Bonzani
Départs vers d’autres Eglises ou en congé illimité :
Pasteurs :
François Ferré
Nicole Glod
Amaury Charras
Sarah Sarg
Christophe Gonzalez
Autres ministres :
Anicet Bassilua Nzuzi
Beatriz Brotto
Jean-Paul Bvouoyele
Grzegorz Kujawa
Sylvie Michel
Paul Schalck
Départ de l’Eglise :
Fabien André
Matthias Hassenfratz-Coffinet
Claude Hunsinger
Changements d’affectation au 1er septembre 2025 (sauf mention contraire) :
Pasteurs :
Benjamin Buchholz : Aubure & Ribeauvillé
Dominique Calla : Coordinateur Communion protestante luthéro-réformée (CPLR)
Lauriane Kuhm : Furchhausen & Dettwiller (1er avril 2025)
Alexis Herrlé : Dynamique consistoriale d’Andolsheim (Algolsheim – Andolsheim – Sundhoffen) (1er mai 2025)
Sophie Herrlé : Aumônerie des Lycées de Colmar et environs
Natacha Cros-Ancey : Colmar – Inspectrice ecclésiastique de Colmar
Stéphanie Ferber : Bischheim (Inspectrice ecclésiastique de Brumath)
Lilian Gerber : Wasselonne
Claude Horviller : Colmar
Débora Knepfler-Mistretta : Strasbourg-Meinau avec dominante théâtrale au 1er novembre 2025
Lea Langenbeck : Aumônier Clinique La Toussaint (mi-temps) – Superviseure FPEC (mi-temps)
Esther Lenz : Responsable du Service de la formation théologique et spirituelle des adultes (1er février 2026)
Hanitra Ratsimanampoka : Metz – Inspectrice ecclésiastique d’Alsace Bossue – Moselle
Marianne Renaud : Responsable de l’Accompagnement des Vocations et de la formation initiale des Pasteurs et de la Formation des Ministres Particuliers
Jean-Louis Sagneth Akonanga : Strasbourg-Hautepierre
Claire-Lise Meyer : Hoerdt & Geudertheim (1er décembre 2025)
Sandra Zurcher-Droit : Vendenheim et accompagnement des prédicateurs (1er octobre 2025)
Autres ministres :
Soon-Ja Lee Petit : suffragance dans le consistoire de Bischheim
Entrées au 1er septembre 2025 (sauf mention contraire)
Pasteures :
Sibylle Klumpp : Responsable des Missions et Solidarités Internationales (1er août 2025)
Sophie-Anne Lorant-Faivre : Plobsheim-Eschau (1er janvier 2026)
Autres ministres :
Natacha Horn, diacre : Sainte-Marie-aux-Mines
Caroline Guthertz, animatrice communautaire : consistoire de Woerth (1er octobre 2025)
Elisabeth Fournier, aumônier : Munster
Le nombre de prêtres est passé de 65 000 en 1960 à 12 000 en 2023. En accueillant des personnes aux origines plus variées, l’institution a trouvé une réponse partielle à la chute des effectifs.
Samedi 28 juin, la nef de Notre-Dame de Paris est pleine à craquer. Des sièges en plastique ont dû être installés sur le parvis. Un à un, sous le soleil brûlant, les candidats à l’ordination s’avancent à l’appel de leur nom, lançant la formule rituelle : « Me voici ! » Ils sont 16 à marcher vers l’autel de bronze consacré quelques mois plus tôt, 16 à s’allonger sur le sol à damiers de la cathédrale, puis à recevoir l’imposition des mains de l’archevêque, Laurent Ulrich, et des quelque 500 prêtres du diocèse de Paris. Pour la première fois depuis l’incendie d’avril 2019, cette liturgie spectaculaire, organisée dans chaque diocèse une fois par an, avant l’été, peut se dérouler à Notre-Dame, et non dans l’église Saint-Sulpice.
Le millésime est à la hauteur de ce décor grandiose : 16 ordinations, c’est 10 de plus que l’année précédente. Après des fêtes de Pâques marquées par une forte hausse des baptêmes d’adultes, l’archevêché de Paris vit un nouveau moment de grâce. Les catholiques ne demandent-ils pas obstinément, dans leurs prières, des prêtres ?
En réalité, ce samedi de juin a tout du trompe-l’œil. « Une parenthèse », tranche cruellement un prêtre parisien : « Il faut remonter loin pour avoir un nombre à deux chiffres, et il faudra de nombreuses années avant que ça se représente. »
L’éphémère miracle parisien ne suffit pas non plus à masquer la tendance nationale, qui est bien à l’anémie des vocations. En ce mois de juin, 90 prêtres sont ordonnés dans les 99 diocèses de France, contre 105 en 2024. Le chiffre place l’année 2025 tout près du plancher historique de 88 ordinations constatées en 2023.
L’évolution est encore plus frappante sur le temps long. En 1960, la France comptait jusqu’à 65 000 prêtres, en comptant les prêtres diocésains et ceux issus d’ordres religieux, en activité ou à la retraite. Ils sont encore 25 000 en 2000, et 12 000 en 2023, dont seuls 6 700 officient encore. La chute est encore plus marquée s’agissant des religieux et des religieuses, passés de 49 800 en 2000 à 17 300 en 2023.
« La bascule se situe dans les années 1960 », rappelle le père Jean-Christophe Meyer, secrétaire général adjoint de la Conférence des évêques de France (CEF), chargé du pôle acteurs de l’Eglise. « C’est à cette époque que la crise devient réellement aiguë, sous le double effet d’une diminution des vocations et du départ de nombreux prêtres, qui abandonnent l’état clérical. On a ensuite pu croire, dans les années 2000, avoir atteint le creux de la vague, mais l’effritement s’est poursuivi, accompagnant la sécularisation toujours plus marquée de la société, mais aussi la crise du monde rural. »
« Le terme de “crise des vocations” n’est pas entièrement approprié tant il s’agit d’une tendance de long terme », affirme de son côté le père Emmanuel Petit, recteur de l’Institut catholique de Paris. Selon le canoniste, le phénomène est plus marqué en France que dans le reste de l’Europe, avec toutefois des disparités régionales : « L’Ouest se tient globalement mieux que l’Est, à l’exception de l’Alsace, un peu plus dynamique. La ville de Paris, certes très sécularisée, garde des paroisses dynamiques. Mais des régions entières, qui comptaient autrefois des séminaires actifs, ne forment aujourd’hui plus aucun prêtre. »
« Engagement sacrificiel »
Année après année, l’Eglise de France a dû revoir son maillage territorial, multipliant les regroupements paroissiaux. Les paroisses les plus démunies, dans les diocèses de Limoges, de Luçon (Vendée) ou de Saint-Flour (Cantal) comptent jusqu’à 60 clochers. Autre solution : le recours aux prêtres étrangers, principalement africains. Selon les chiffres fournis par l’Eglise, ceux-ci sont majoritaires dans au moins 14 diocèses. En tout, selon les chiffres de la CEF, sur les quelque 6 700 prêtres en activité en France, un tiers sont des étrangers.
Au fil des ans, c’est aussi le profil des prêtres qui a évolué. Une semaine après son ordination à Notre-Dame, Erwan Saint-Macary, 33 ans, commence à peine à réaliser : « Je bénis beaucoup, et je reçois beaucoup d’encouragements chaleureux. » Clin d’œil du destin, celui qui fut un temps médecin militaire donne rendez-vous devant l’hôpital Saint-Antoine, à Paris, où il vient de donner l’onction des malades à des patients. « Dans cette position, auprès de ceux qui souffrent, j’ai la sensation de vivre l’essence de ce qui m’avait amené à choisir la médecine, raconte-t-il. A la différence près qu’en médecine on ne parle pas de l’âme… »
Le père Saint-Macary a grandi dans une famille pieuse du Sud-Ouest. A 5 ans, il annonçait à sa mère : « Je veux être prêtre et saint. » La suite fut moins linéaire, entre une vision du monde « très cartésienne », ce choix de la médecine militaire, de longues périodes loin de l’Eglise et des aventures amoureuses qui, jusqu’au bout, lui ont laissé penser qu’il serait incapable d’embrasser le sacerdoce… Il faut d’abord « l’expérience mystique d’une confession bouleversante », à l’âge de 23 ans, pour que, peu à peu, il envisage de s’engager sur la voie de la prêtrise et finisse par entrer au séminaire, trois ans plus tard.
Ce parcours tortueux n’est pas unique : de plus en plus de prêtres connaissent plusieurs vies, plusieurs carrières avant de se consacrer à l’Eglise. Le changement est aussi sociologique. « Avant, le séminaire constituait pour les jeunes de certains milieux, par exemple paysans, une voie pour accéder à une formation, pour s’élever socialement et culturellement, » rappelle le père Emmanuel Petit. « Aujourd’hui, la situation est inverse : les nouveaux prêtres viennent de familles favorisées de la bourgeoisie urbaine ou des milieux aristocratiques, et le sacerdoce est perçu comme un engagement sacrificiel. »
« Au départ, ma mère et ma grand-mère ont eu du mal à accueillir ma décision », explique, comme en écho, le père Erwan Saint-Macary. « Elles avaient peur que je ne sois pas heureux. Et même au sein de l’Eglise, beaucoup de gens continuent à me dire : “C’est si dur, vous êtes courageux…” » Le jeune prêtre vit au contraire son envoi à Bondy, une paroisse pauvre mais très dynamique de Seine-Saint-Denis, comme « quelque chose d’extrêmement stimulant ».
Participation accrue des laïcs
L’Eglise de France, elle, continue de s’interroger sur les moyens de répondre à la raréfaction des vocations. « Réorganiser la carte des paroisses ne répond pas à tout », résume le père Jean-Christophe Meyer, de la CEF, qui note d’ailleurs que « dans beaucoup de diocèses on touche à la limite de ce qui est possible en matière de regroupements ». L’ecclésiastique plaide notamment pour que « les communautés de chrétiens se prennent encore plus en main, sans attendre un prêtre qui de toute façon ne peut pas exercer comme on le faisait il y a cinquante ans ».
Ces pratiques, déjà bien établies dans les paroisses françaises, rejoignent la réflexion portée au niveau mondial par le pape François (2013-2025) sur la synodalité, autrement dit la participation accrue des laïcs, femmes comprises, à la vie de l’Eglise. Sous son pontificat, les fonctions de lecteur et d’acolyte (servant d’autel) ont aussi été ouvertes aux femmes, le ministère de catéchiste (une fonction et un statut qui vont au-delà du simple « prof de caté ») ouvert aux laïcs. Jean-Christophe Meyer souhaite aussi que l’Eglise arrive à « faire entendre l’appel du sacerdoce » dans les communautés issues de l’immigration, où l’on rencontre des paroissiens fervents mais peu de prêtres.
Reste la question de l’ordination des femmes ou l’ouverture du mariage aux prêtres. « Aucune question n’est en soi tabou », tranche Emmanuel Petit, « mais ce ne serait pas au niveau du débat que de le réduire à cet enjeu d’effectifs ». Le même note par ailleurs que les religions comptant des ministres du culte femmes ou mariés connaissent elles aussi une crise des vocations.
Le Monde août 2025.